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Symposium sur les mines : La Guinée dans la dynamique d’un nouveau départ ?

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La Guinée a abrité, du 9 au 11 mai, la cinquième édition du symposium des mines qui devra lui permettre d’aborder un nouveau virage, avec comme thème ‘’ secteur minier : levier de transformation de l’économie nationale au profit de tous les acteurs’’. Etiquetée de scandale géologique, la Guinée, présentée comme l’un des pays les plus riches en ressources naturelles et les plus pauvres d’Afrique, peine à transformer son potentiel en une opportunité de développement. Le chef de l’Etat, Alpha Condé, s’est engagé à opérer des ruptures.

La Guinée, présentée comme un château d’eau de l’Afrique, avec 1200 cours d’eau, dont 14 avec un statut international, a procédé, de nouveau, au diagnostic du secteur des mines du 9 au 11 mai dans un symposium qui a réuni plus de 500 délégués experts, autorités étatiques, partenaires techniques et financiers. Ce pays qui renferme de ressources naturelles ‘’abondantes’’, ne profite pas de ses richesses.

Le symposium, organisé par le ministre des Mines et de la Géologie, a permis d’engager, de nouveau, des réflexions de fond pour tracer de bonnes perspectives à ce pays assimilé à un accident géologique. Le chef de l’Etat guinéen, Alpha Condé, a réitéré sa volonté de s’appuyer sur la diversification au lieu de miser uniquement sur le potentiel minier pour réaliser une croissance économique. Pour lui, « l’agriculture et l’agrobusiness devraient être les autres pierres angulaires du système ». Il a profité de ces assises pour exhorter les compagnies étrangères au respect du code minier et à l’application du contenu local non sans souligner qu’il a eu le courage de retirer 800 permis miniers depuis qu’il est à la tête du pays. Il a pris l’engagement d’éradiquer les mauvaises pratiques qui ont retardé le décollage économique de son pays. Pour rappel, le pays suscite un engouement réel des investisseurs qui ont réussi à se faire attribuer indûment 1529 titres miniers entre 2008 et 2011, selon le rapport Itie de 2012, des titres qui ont été placés en bourse au détriment de la population.

Revoir le modèle de développement.

En effet, des scandales enregistrés en Guinée, avec un taux de corruption jugé élevé, ont poussé des experts à dessiner des perspectives lugubres à ce pays qui regorge d’un immense potentiel. Elle renferme plus de 40 milliards de tonnes de bauxite, plus de 10 milliards de tonnes de haute qualité de minerai de fer, plusieurs milliers de tonnes d’or et du diamant de qualité de joaillerie. Des richesses qui enrichissent les compagnies étrangères et contribuent à l’appauvrissement des populations locales. « Ce potentiel minier crée une attractivité forte pour les investissements directs étrangers. Il ne profite pas aux communautés locales », déplore M. Saa Pascal Tenguiano, consultant en gouvernance des ressources. Il a été interpellé à l’issue d’une session de formation, organisée par l'Institut de recherche et de promotion des alternatives de développement en Afrique (Irpad l’Irpad qui a réuni des journalistes de six (6) pays africains. Il est l’auteur d’une étude sur ‘’les forces et faiblesses des cadres institutionnels et réglementaires de la gestion des ressources minières en Afrique de l’ouest : étude de cas de la Guinée’’, coréalisée avec Macky Ba. Les deux auteurs invitent les autorités à repenser le modèle de développement.

En effet, pour le consultant Macky Ba, si la Guinée a fait un mauvais départ, c’est dû, en quelque partie, au fait que ‘’ la gestion de ces ressources minières a été fortement handicapée par la crise sociopolitique que la Guinée a connue dans les années 2000 et les problèmes de gouvernance économique qui en ont découlé’’. Une période qui, ajoutent-ils, a été caractérisée par une détermination des niveaux d’imposition et une application de la réglementation arbitraire et discrétionnaire qui ont érodé les revenus du secteur et la confiance des investisseurs dans le pays.

Des réformes anéanties par les compagnies étrangèresLa dictature des multinationales aurait également empêché une relance de l’économie. En guise d’exemple, la révision du Code minier en 2011, qui vise à accroître la participation de l’Etat dans le secteur minier et à augmenter les droits de douane n’a pas été du goût des compagnies minières. « Après l'adoption du Code minier de 2011, les entreprises extractives ont exprimé des préoccupations sur les nouveaux règlements qui ont conduit le gouvernement à apporter, en 2013, divers aménagements fiscaux au bénéfice des opérateurs miniers. Malgré ces concessions, le nouveau Code minier et le développement de certains sites devraient augmenter les ressources fiscales de la Guinée de façon significative et ainsi contribuer au développement socioéconomique », fait savoir Macky Ba qui a également travaillé sur l’étude de l’arsenal juridique. Il estime que « l’analyse approfondie du cadre stratégique, politique, juridique et institutionnel du secteur minier guinéen permet de comprendre, avec aisance, les différents problèmes auxquels la Guinée fait face et ainsi proposer des solutions pour le bénéfice de tous les acteurs.’’

L’opacité entretenue par des autorités politiques

Si la Guinée n’a pas pu décoller, les raisons sont aussi à chercher dans « l’incapacité des politiques minières mises en œuvre par les différents régimes qui se sont succédé depuis l’indépendance du pays en 1958 et qui ont été jugées peu attrayantes par les grands groupes, un environnement des affaires pas propice à l’investissement », selon les experts de la gouvernance. ‘’La gestion du secteur minier est très affectée par la situation politique du pays. Les conventions qui ont été négociées, ces dernières années, ont été réalisées dans des conditions d’opacité totale souvent avec la complicité des autorités politiques. Dans certains cas, compte tenu des engagements, elles risquent d’hypothéquer, durant une période, les intérêts nationaux’’, souligne M. Saa Pascal Tenguina. Des améliorations ont, dit-il, été notées ces dernières années. Toujours est-il que pour nos différents interlocuteurs, il y a lieu de renforcer les stratégies nationales, de mettre en place des cadres de concertation entre tous les acteurs impliqués dans le développement et le renforcement de capacités des ressources humaines. L’Etat est également invité à mieux contrôler la production des exploitants miniers et à veiller à l’application de la fiscalité minière. Lors du séminaire, qui s’est tenu à Bamako, M. Tenguiano a déploré le fait qu’il n’existe, par exemple, qu’un expert du diamant au Bureau national d’expertise de diamant qui ne compte que 8 fonctionnaires. Parmi ces derniers, un seul est spécialiste d’expertise en diamant. Idem pour la brigade antifraude des matières qui ne compte qu’un élément au niveau de l’aéroport.

Les grandes lignes du Code minier

Le Code minier de la Guinée comporte un total de 221 articles et neuf (9) titres. Selon les spécialistes de la gouvernance des ressources minières, ce nouveau Code minier vise un développement socio-économique durable et devrait permettre un partage équitable des ressources. Il réaffirme le principe de la propriété de l’Etat sur les substances minérales, notamment les gîtes artificiels, les eaux souterraines et les gîtes géométriques se trouvant sur la surface du sol ou renfermés dans le sous-sol ou dans les cours d’eaux. Ces substances sur le territoire de la République de Guinée ainsi que dans la Zone économique exclusive ( Zee) ne peuvent être, sous réserve du Code minier et du Code foncier et domanial, susceptibles d’aucune forme d’appropriation privée. Le Code souligne aussi que pour l'attribution faite par l'État d'un titre minier, cela donne immédiatement droit à une participation de l'État, à hauteur de quinze pour cent (15%) au maximum, dans le capital de la société minière qui ne peut être diluée par des augmentations éventuelles de capital. Cette participation de l’Etat sera libre de toutes charges et aucune contribution financière ne peut, en contrepartie, être demandée à l'État. Cette participation sera acquise dès la signature du titre minier. L'État se réserve également le droit d'acquérir une participation supplémentaire de vingt pour cent (20%) en numéraire, selon des modalités définies avec chaque société concernée.

 

De notre envoyée spéciale en Guinée, Matel BOCOUM

Source: Le Soleil Online

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