Des accords pour la fin ultime des accrocs

 

Au risque de se faire taxer de rabat-joie, en cette période quelque peu euphorisante de renaissance d’espoirs et de perspectives de lendemains meilleurs, il y’a de quoi admettre non sans réserves, que l’adresse à la nation du Capi-Prési depuis Ouaga, à travers laquelle il a appelé les guinéens au calme et surtout à soutenir les actions du gouvernement d’union nationale, est de nature à favoriser la normalisation de la situation chaotique que traverse le pays.

Bien entendu, ces réserves tiennent compte des conditions d’application concrète des dispositions contenues dans ce qui tient désormais lieu d’accords de sortie de crise, sur un terrain politique plus que jamais phagocyté par les sournoiseries et niaiseries d’opportunistes qui continuent de pulluler autour du pouvoir chancelant des militaires, mais aussi à cause des sempiternels dissentiments et rivalités entre prétendants au statut tant convoité, de premier Président démocratiquement élu.

Qu’à cela ne tienne, la confirmation du contrat d’intérimaire du général Konaté à la tête de l’Etat, rassure tous les protagonistes de la crise, quant à la poursuite irréversible du processus de retour à l’ordre constitutionnel, au regard de sa disposition d’esprit d’ouverture et de conciliation et surtout par la pertinence des premiers actes posés, à travers notamment la nomination d’un P.M issu de l’opposition, prouvant ainsi sa volonté de rupture totale d’avec les méthodes équivoques, empruntées jadis par Dadis, son prédécesseur dans la direction des affaires.

Soit dit en passant, il est saluer l’héroïsme dont il a fait montre,  une fois n’est pas coutume chez nos dirigeants, pour résister avec courage et détermination, à l’offensive tout azimuts des jusqu’au-boutistes du CNND, dont les manœuvres déstabilisatrices tentant à faire revenir le Capi-Prési de sa retraite de convalescence malgré les oppositions, auraient pu anéantir les maigres espoirs de la population, réclamant dans l’intérêt général, la fin des hostilités qui minent la paix sociale et hypothèquent l’avenir de la nation.

Décidément, il est loin le temps des dadis-shows, où l’intrépide Capitaine, dans une posture martiale et un entrain de délires mégalomaniaques, tirait un plaisir non dissimulé, à se bomber le torse, pour fustiger les soi-disant attitudes antipatriotiques des leaders politiques, qu’il qualifiait avec dédain, d’apatrides cherchant uniquement à s’accaparer d’un pouvoir, que ses compagnons d’armes et lui avaient pourtant acquis avec force, un certain 23 décembre 2008 et exerçaient depuis, avec un zèle certain.

L’exaspération des aversions instinctives à son égard, tient principalement du manque de tact et d’humilité dont il fit preuve dans l’exercice de sa fonction, en tant que Président autoproclamé, avec les dérives autocratiques qui ont fini par raviver les sentiments de frustration et d’opposition à son régime. L’illustration macabre du climat d’incompréhension et de suspicions ainsi entretenu, s’est traduite par les tragiques évènements du 28 septembre 2009 et la tentative d’assassinat dont il a été victime de la part de son aide de camp, le 3 décembre 2009. Et depuis, il s’est retrouvé éjecté dans des circonstances peu enviables, du fauteuil présidentiel pour un exil forcé, car sa volonté de retour au bercail, est aujourd’hui considérée par maints observateurs de la vie politique guinéenne, comme pouvant entraver  la relance du processus de transition sous l’impulsion du général Sékouba Konaté, qui est en passe de lui ravir la vedette, par son sens élevé des responsabilités, avec sa promesse ferme de respect des engagements initiaux de la junte à sa prise du pouvoir.

Quel destin de paria, pour un homme qui a eu  la chance historique de s’inscrire héroïquement dans les anales de l’histoire, en permettant pour la première fois, la dotation du pays dans la paix et la tranquillité, d’institutions républicaines démocratiques, mais qui au contraire, s’est naïvement  laissé emporter dans le tourbillon de la discorde et de la haine, par la démagogie et le clientélisme des clans constitués autour de lui, sur des bases ethnique et/ou régionaliste.

Les bouleversements sociaux de ces derniers temps, ont quand même eu le mérite de prouver à tous les décideurs, que plus jamais, la population ne se laissera berner, car elle a tellement encaissé de coups, qu’elle s’en sort suffisamment avertie pour ne plus avancer à découvert.  On ne peut donc que se réjouir que l’on en revienne finalement à de meilleurs sentiments, avec l’acceptation par la junte, de la nécessité de révision de ses prétentions de confiscation du pouvoir, en consentant de façon responsable, à faire des concessions qui reprennent en compte, quelques points saillants des revendications populaires, dont entre autres, le retrait des militaires de la sphère politique et l’organisation d’élections libres et transparentes dans un délai raisonnable.

La parenthèse Dadis est vraisemblablement entrain d’être refermée, même s’il conserve théoriquement le titre honorifique de Président de la République et à ce propos, faut-il croire que ce fut l’une des conditions de son acceptation des accords, une manœuvre dilatoire pour bénéficier autant que possible, d’une certaine immunité liée à l’exercice de sa fonction, par rapport aux menaces de poursuites qui pèsent sur lui dans le dossier en suspens des massacres du 28 septembre.

En tous les cas, la réalité du pouvoir se trouve désormais à Conakry, dans les mains du général Konaté, qui pour mener à terme la transition de façon consensuelle, doit s’employer à la restauration de l’autorité de l’Etat et travailler en étroite collaboration avec le nouveau P.M, dont l’analyse et l’interprétation des problèmes des différents secteurs de l’économie nationale, lors de la campagne  présidentielle de 1993, pour ceux qui s’en souviennent, laissent paraître un homme de conviction, profondément imprégné des réalités du terrain.

Il n’y a plus qu’à espérer et souhaiter qu’ils restent tous les deux fidèles à leur réputation, car on le sait en Guinée plus qu’ailleurs, le pouvoir corrompt facilement et surtout, Jean Marie Doré, pour ne pas se laisser empêtrer et embourber dans un magma de profiteurs, pour reprendre ses propres termes, doit s’engager officiellement à ne se pas présenter comme candidat à la magistrature suprême, pour garantir la neutralité de l’administration dans les futures joutes électorales. 

Que les guinéens que nous sommes comprennent enfin, que le problème de notre pays va au-delà de Dadis. C’est pourquoi, il est  important de savoir, que si la moralisation de la vie publique demeure aujourd’hui un problème crucial, il en est de même pour toute la conception sociologique de la nation guinéenne, dont les fondements structurels méritent une refonte générale, qui permette la culture dans les consciences, du sentiment d’appartenance à une communauté de destin, avec comme leitmotiv, Travail-Justice-Solidarité.

Du boulot, y’en a à gogo sur la planche. Il est donc nécessaire au stade où nous en sommes, d’associer toutes les compétences et les bonnes volontés au-delà des clivages, pour que notre  rêve commun de progrès social et économique, devienne enfin une réalité.

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