Créer un site internet

L'immigration africaine : l'approche utilisatrice et restrictive de la France

nabbie-baby-soumah-1.jpg

L'immigration africaine : l'approche utilisatrice et restrictive de la France, telle a été la contribution de Nabbie Soumah, lors de Conférence-débat de l'Association des jeunes étudiants et amis de la Côte d'ivoire (AJEACI), Pole scientifique de l’Université Lille 1 qui s'est tenue le Samedi 02 mars 2013, avec pour thème Immigration et intégration.

INTRODCUTION : Il n’est pas inutile de souligner d’emblée un paradoxe extraordinaire dans le traitement infligé aux immigrés sous différents cieux :
- Lors du premier débat télévisé du vendredi 26 septembre 2008 avec son concurrent Georges Mac Cain, Barack Obama a rendu un hommage émouvant aux USA : « un pays qui a permis au fils d’un immigré kenyan de réaliser le rêve américain en postulant à la magistrature suprême » déclara-t-il. Il a été réélu en novembre 2012.
 
- La chancelière Angela Merkel a rendu un hommage solennel aux travailleurs étrangers arrivés en Allemagne depuis les années 50 lors de la cérémonie « L’Allemagne vous remercie » organisée le 01 octobre 2008.
 
- En France, un sans-papiers nigérian de 47 ans, qui fuyait des policiers venus l’interpeller, est décédé à Paris le 01 octobre 2008 après avoir fait une « chute » depuis le 7ème étage. Yvan, 12 ans, a connu le même sort à Amiens, la chinoise Chuan Liu à Belleville le 24 septembre 2007 et un malien s’est noyé dans la Marne le 4 avril 2004. Les enquêtes menées avec « célérité » suivent toujours leur cours au grand dam des familles éplorés. Quel cruel paradoxe !
 
La France est un pays d’immigration depuis la deuxième moitié du 19ème siècle. Jusqu’en 1945, elle ne dispose pas, à proprement parler, de politique d’immigration, mais de mesures prises ponctuellement.
 
La publication de l’ordonnance du 2 novembre 1945 sur l’entrée et le séjour des étrangers en France est symbolique du début de la mise en œuvre d’une véritable intervention de l’Etat dans ce domaine. Elle fixe en outre le principe du droit du sol et la double peine. En même temps est créé l’Office National d’Immigration qui donne à l’Etat le monopole de l’introduction de la main d’œuvre étrangère dans le pays. Trois cartes de séjour sont alors instaurées (1, 3 et 10 ans) et l’immigration des familles, souhaitée dans une optique démographique, est favorisée.
 
Aujourd’hui, les sources de droit sont complexes et relèvent non seulement de la législation française mais également de textes internationaux, conventions, traités ou accords bilatéraux.
 
Depuis l’entrée en vigueur du traité d’Amsterdam du 02 octobre 1997, la compétence communautaire dans les domaines de l’immigration et de l’asile est établie. Mais en attendant une harmonisation des politiques au niveau européen, les questions de l’immigration et de l’asile restent encore largement du niveau national.
 
Selon l'étude « Immigrés et descendants d'immigrés en France « , publiée en octobre 2012 par l'INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques), plus de 5,3 millions d'immigrés vivaient en France en 2008, les 2/3 étant natifs de pays hors Union européenne. Leurs descendants sont près de 6,7 millions, soit 11 % de la population et 13,5 % des 25-54 ans.
Il n'est pas inutile de rappeler qu'à l'heure actuelle, ce sont toujours les lois Sarkozy qui continuent de s'appliquer en matière de séjour des étrangers et que le sujet de l'immigration avait dominé la campagne présidentielle de 2012.
 
Sous l’ère de Nicolas Sarkozy, depuis son arrivée au ministère de l'intérieur en 2002 et jusqu'à sa défaite électorale de mai 2012, toutes les lois sur la maîtrise des flux migratoires et le droit d'asile sont allées dans le sens d'un durcissement des conditions d'entrée et de séjour des étrangers.
 
La directive européenne dite « Retour » du 18 juin 2008, adoptée sous la pression de la France en tête de la droite européenne, vise l'expulsion des étrangers en situation irrégulière qui fixe à 18 mois la durée maximale de leur placement en rétention et prévoit une interdiction de séjour de 5 ans dans l'Union européenne. Elle fut fortement contestée par des associations de défense des travailleurs immigrés qui l'ont qualifiée de « directive de la honte » .
 
La particularité de l'’immigration africaine en France constitue un sujet très pertinent que j'exposerai dans cinq problématiques liées :
 
I) L'immigration qui est un concept évolutif, élargi, une notion extensive.
 
II) Les caractéristiques, les spécificités de l'immigration africaine.
 
III) L'approche utilisatrice et restrictive de l'immigration africaine par la France avec l’exemple des étudiants qui sont dans une situation précaire.
 
IV) L'intégration des immigrés africains qui est dans l'impasse, en panne : c'est, pour eux, le blocage de la machine intégrationniste et de l'ascenseur social français.
 
V) Les initiatives nationales, locales et des associations d'étudiants pour un meilleur accueil des étudiants africains en France. J'analyserai ici les propositions faites par les différents acteurs concernés par les problématiques liées aux étudiants africains, qu'ils soient institutionnels ou associatifs, en prenant appui sur les initiatives locales menées notamment par le Conseil national des associations des jeunes Guinéens de France (CNJGF). Le CNJGF avait rencontré, en ma compagnie, le 11 février dernier Josepha Camara la directrice de Campus France Guinée qui était de passage à Paris. Ce dispositif a été créé en 2007 dans 180 pays avec 222 agences.
I/ IMMIGRATION : UN CONCEPT EVOLUTIF, ELARGI, EXTENSIF
 
L’étranger est qualifié comme « une personne n’ayant pas la nationalité française » alors l’immigré est « une personne venue s’établir en France » .
 
Selon la définition internationale des Nations-Unies, l'immigré est une « personne née dans un autre pays que celui où elle réside » ; alors que l’INSEE utilise une définition plus restrictive en le qualifiant de « personne née étrangère à l’étranger » .
 
Etymologiquement le terme « immigration » est assimilé au mot grec « diaspora » qui signifie « dispersion » ; il fut d’abord utilisé par l'homme politique et historien athénien, l’auteur de « l'Histoire de la guerre du Péloponnèse » relatant le conflit entre Athènes et Sparte Thucydide (460 av. J.C.-400 av. J.C.) pour qualifier l’exil forcé des habitants de l’île d’Egine vaincue par Athènes.
Il sera repris dans l’histoire religieuse pour relater l’éparpillement des premières communautés chrétiennes dans l’empire romain.
 
Aux premier et deuxième siècles après Jésus Christ le qualificatif « diaspora » fut utilisé pour évoquer des Juifs dispersés et chassés de Palestine.
L’Afrique, berceau de l’humanité, a été le point de départ des premiers flux migratoires vers d’autres cieux ; la migration est un phénomène naturel, inhérent à la nature humaine. Mais l’esclavage, la traite ignominieuse des « nègres » , engendra une « dispersion » forcée de communautés africaines sur le Nouveau Continent.
La notion de « diaspora » , d’expatriation avec la formation, la constitution de « communautés » minoritaires nationales résidant à l’étranger, au fil du temps, sera élargie pour quatre raisons majeures :
 
- Des événements tragiques liés à la politique, à la traque des opposants, aux guerres entre Etats, de libération ou civiles : les Arméniens, les Vietnamiens, les Palestiniens, les Cubains, les Haïtiens, les Kurdes, les populations des anciennes colonies portugaises, en Afrique [Cote d'Ivoire, les 2 Congo, la Guinée sous Ahmet Sékou Touré (1922-1984), Guinée-Bissau, Libéria, Sierra-Léone, etc.].
 
L'histoire du continent noir est hélas toujours liée à la tragédie et à la désolation, le réceptacle de nombreux fléaux ; ce qui en fait le cas social de l'humanité.
 
- Une situation économique insupportable : les diasporas irlandaise, mexicaine, indienne, africaine, …
 
- Les catastrophes naturelles liées à la problématique environnementale, aux questions écologiques, à la dégradation de notre planète du fait de l’Homme : les déplacements massifs de populations fuyant les zones sinistrées.
 
- La préservation de réseaux communautaires : certaines diasporas se sont constituées par vagues migratoires successives durant plusieurs siècles mais avec des stratégies fondées sur la préservation de réseaux communautaires parfois secrets et inaccessibles ; à l’instar de la diaspora chinoise ou irlandaise.
 
Quelles que soient les raisons de l’expatriation, le groupe reste homogène, renforce la solidarité interne pour lutter contre toute forme d’ostracisme, de discrimination, pour préserver sa culture, ses traditions et surtout pour conserver la mémoire du désastre initial et des faits ayant entraîné, occasionné sa migration (cf. les Arméniens, les Kurdes, les Juifs et la Shoah, etc.).
II/ LES CARCTERISTIQUES DE L'IMMIGRATION AFRICAINE
 
L’immigration noire africaine est moins bien connue, moins documentée que l’immigration maghrébine qui est de loin la plus nombreuse et la plus ancienne.
1) L’immigration maghrébine
 
Il est intéressant de tirer brièvement des leçons historiques de cette immigration qui a connu trois vagues successives :
 
- une vague d’immigration de travail, à la fin des années 1960 et au début des années 1970 : immigration pour partie régulière et pour partie clandestine, la partie clandestine étant rapidement régularisée ;
 
- une vague d’immigration familiale dans la foulée des décisions prises par le couple exécutif Giscard/Chirac en 1975 : les épouses, les enfants, les mères et les sœurs sont alors venus rejoindre en France les hommes précédemment immigrés ;
 
- une vague d’immigration nuptiale à partir des années 1992/1995 : arrivés à l’âge de se marier, beaucoup d’immigrés de la seconde génération vont chercher leur conjoint dans le pays d’origine de leurs parents.
 
L’immigration maghrébine reste en 2007 la première immigration : avec 60 501 titres de séjour sur 180 736 délivrés. Elle se rapproche, de plus en plus, de sa culture d’origine et ses revendications communautaires se multiplient (constructions de mosquées, exigences de repas hallal, pratique de plus en plus impérative du Ramadan, demandes de cimetières confessionnels, etc.).
2) Les immigrés sub-sahariens
 
Ils n’étaient que 20 000 en 1962, puis 570 000 en 2004, aujourd’hui entre 1,1 million et 2 millions de Noirs selon différentes sources et études. Les statistiques officielles ne représentent pas la réalité ethnoculturelle pour au moins trois raisons :
 
- d’abord, elles sous-estiment le nombre des clandestins ;
 
- ensuite, elles ne prennent pas en compte la seconde génération immigrée, née en France et binationale, soit française au regard du Code de la nationalité française, soit africaine au regard du Code de la nationalité du pays d’origine ;
 
- enfin, elles ignorent la troisième génération.
En partant des statistiques de l’Institut national d’études démographiques (INED), de la Direction de la population et des migrations et de l’INSEE mais en prenant en compte la deuxième génération, certains économètres statisticiens estiment à 1 080 000 le nombre de Noirs africains et à 757 000 les personnes originaires des DOM-TOM ; Pour le CRAN (Conseil représentatif des associations noires de France), 2 millions de Noirs sont présents en Métropole.
 
L’immigration noire africaine représenterait donc 3 % de la population métropolitaine. Pour l'INSEE, la deuxième génération est plus importante en nombre que la première : En 2009 : 18,7 % des jeunes de moins de 18 ans en métropole avaient au moins un parent immigré ; en 2010 : 27,3 % nouveau-nés en métropole avaient au moins un parent immigré.
 
La première caractéristique de cette « deuxième génération « est sa jeunesse. Les moins de 35 ans représentent plus de 40 % des descendants d'immigrés adultes.
 
La moyenne 2005-2010 des premiers titres de séjour délivrés est de l'ordre de 190 000 par an pour 4 types : les étudiants environ 60 000 en 2010 ; la migration familiale : 85 000 ; les migrants économiques : 20 000 ; et environ 10 000 réfugiés.
La majorité de titres de séjour délivrés sont au titre de la migration familiale (73 %).
 
Ces immigrés s’installent principalement dans les zones frontalières et les régions urbanisées et industrielles en Ile-de-France, dans les régions du Sud-est (Paca, Languedoc-Roussillon, Corse) et en Alsace.
Le poids de l'histoire : En Europe, les liens géographiques et historiques sont déterminants : la quasi-totalité des immigrés algériens, par exemple, se retrouvent en France, tandis que les Turcs ont choisi l'Allemagne.
 
Une partie de ces nouveaux immigrés légaux est issue de la clandestinité qui puise sa source :
 
- dans les entrées de court séjour, non suivies de départ ;
 
- dans les demandes de statut d’asile politique auprès de l’Office français pour la protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) refusées dans 80 à 90 % des cas mais créant des déboutés rarement reconduits à la frontière.
 
Le séjour irrégulier est devenu une voie importante d’une immigration qui tend à devenir pérenne et croissante.
La main d’œuvre clandestine, la plus docile et la moins payée, est donc économiquement la plus compétitive.
 
Ainsi le gouvernement Jospin procéda de 1997 à 1999 à de nombreuses régularisations d’étrangers clandestins.
 
Par ailleurs, on constate une féminisation croissante de l’immigration sub-saharienne qui reste à majorité masculine ; mais elle est plus fortement féminisée que l’immigration maghrébine à ses débuts, pour au moins trois raisons :
 
- Les emplois occupés dans la restauration, les services à la personne (ménagers ou de soins) avec un important volet d’emplois féminins.
 
- Les femmes sont de plus en plus nombreuses à être candidates à l’asile politique (plus de 35 % des demandeurs) au titre de la « protection subsidiaire » et avancent des risques de mariage forcé, de mariage polygame ou d’excision pour les fillettes, etc. Les déclarations de Nicolas Sarkozy du 29 mai 2007 ont été mises en œuvre : « A chaque femme martyrisée dans le monde, je veux que la France offre sa protection en lui donnant la possibilité de devenir française « .
 
- enfin, l’ « immigration nuptiale » est la troisième cause de féminisation de l’immigration. Ceci se conclut souvent par des accessions à la nationalité française.
Cette féminisation globale de l’immigration africaine est lourde de conséquences démographiques car elle concerne principalement des jeunes femmes en âge d’être mères et avec un taux de fécondité élevé de l’ordre de 3 enfants par femme.
 
Dans une étude publiée par le ministère de l’Education nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, M. Kabangu Muanza, docteur en psychologie du travail, souligne les traits principaux de la culture africaine. Il évoque notamment l’esprit communautaire, la domination masculine, la parenté élargie (plus sociale que biologique), l’oralité, le rapport incertain au temps.
III/ L'APPROCHE UTILISATRICE DE L'IMMIGRATION AFRICAINE PAR LA FRANCE : LE CAS DES ETUDIANTS
« A propos de désir, nul n'ignore que la France souhaite accueillir de nouveaux immigrés, mais pas n'importe quelle catégorie d'immigrés. Elle veut des cerveaux, nos élites dont nos étudiants » déplorait un dirigeant africain.
 
L’accueil des étudiants étrangers est devenu un enjeu majeur au niveau mondial : la France n'est pas en reste et fait un « investissement « à long terme en les accueillant en fonction de ses intérêts économiques et stratégiques propres et pour renforcer son réseau culturel.
 
En analysant les phases marquantes de l'immigration étudiante , l’on constate un passage de l'ouverture à la restriction de l’offre universitaire.
a) L' arrivée en masse des étudiants originaires des anciennes colonies : A partir de 1971, il y a une ouverture des frontières aux élites africaines issues des premières années des indépendances.
b) L'immigration étudiante africaine régresse au profit des migrations intra-européennes : Après une période d'ouverture, la crise économique due au second choc pétrolier et la dégradation des conditions d'études à la suite de la croissance importante des effectifs d'étudiants français semblent avoir conditionné l'attitude du gouvernement en matière d'accueil des étudiants étrangers.
 
C'est le début de la restriction de l’offre universitaire française. Des programmes d’échanges très importants comme ERASMUS (réalisation d'un espace européen de l'enseignement supérieur), TEMPUS (coopération avec les universités et les entreprises de l’Est européen), LINGUA (enseignement des langues du programme communautaire « Socrate » ) ont joué un rôle important dans la croissance des étudiants européens en France.
Cette forte augmentation est également due aux mesures introduites en 1998 par Claude Allègre, ancien ministre de l'éducation nationale sous la Gauche plurielle dirigée par Lionel Jospin, pour pallier le retard de la France par rapport aux autres pays de référence. D’où la création de l’agence Edufrance chargée de promouvoir le système éducatif français à l’étranger, en particulier vers l’Asie et l’Amérique Latine.
c) La sélection officielle des « meilleurs éléments » :
 
- Le décret du 31 décembre 1979 , dit « Décret Imbert » , traduit la volonté de contrôle et impose une procédure de préinscription pour les étrangers qui s'inscrivent pour la première fois dans l'enseignement supérieur.
 
- La Carte « Compétences et Talents » ou l'officialisation de la sélection dans une approche utilitariste : en juin 2006, une nouvelle loi de réforme du Code d'Entrée et de Séjour des Etrangers et Demandeurs d'Asile dite Loi CESEDA introduisit des changements pour les étudiants étrangers ;
Les conventions bilatérales sont des accords politico-économiques déséquilibrés : Comme pour les migrations économiques, les circulations d'étudiants sont régies par des accords internationaux qui ressemblent souvent à des marchandages autour desquels s'imposent la loi du plus fort.
IV/ L'INTEGRATION DANS L'IMPASSE, EN PANNE
L’intégration passe inévitablement par trois conditions cumulatives, liées : une bonne formation et qualification, ensuite un emploi gratifiant et un logement décent.
1°) La dégradation continue de la situation précaire des étudiants
La France a toujours été une destination prisée par beaucoup d'étudiants africains. La proximité culturelle, le relatif faible coût des études étant des facteurs incitatifs, déterminants. La poursuite des études y est le second motif d'immigration légale après le regroupement familial.
Aujourd'hui, venir du continent noir ou de la Guinée pour se former dans les universités françaises relève d'un parcours kafkaïen, toujours plus difficile lié aux difficultés financières, de se loger, au labyrinthe administratif ; en somme, les conditions d'accès aux universités françaises se sont sensiblement dégradées ces dernières années, d'où une précarisation dans tous les aspects de leur vie.
Le parcours administratif kafkaïen du combattant s'effectue en deux étapes :
 
- Les modalités dans le pays d'origine avant le départ pour l'obtention du visa.
 
- Les modalités à l'arrivée en France avec la multiplication des interlocuteurs.
 
La Carte de séjour est temporaire et n'est valable qu'un an et son renouvellement dépend de l'assiduité aux études et aux examens, la cohérence du cursus universitaire ou des changements d'orientation et de la progression dans les études suivies ; les étudiants français ont le droit d'échouer pas les étudiants étrangers qui sont les mal lotis du logement et les petits travailleurs infatigables, déqualifiés.
 
La circulaire Guéant les empêche d'obtenir leur changement de statut afin de pouvoir signer leur contrat de travail malgré leurs diplômes cotés (masters 2, grandes écoles) et des promesses d'embauches de recruteurs prestigieux.
 
Après avoir trouvé un logement, il faut honorer ses charges et besoins. Mais il s'est développé une « véritable spécialisation » des étudiants africains dans certains métiers peu gratifiants au regard de leur formation, leur cursus : gardiennage, hôtellerie, ménage, services à la personne, etc. Ceci engendre une « déqualification professionnelle » des étudiants qui ont ainsi un travail sans relation avec leur formation initiale et qui s'y installent durablement malgré eux.
 
L'omnipotence et l’intrusion de la Préfecture dans le cursus universitaire et la vie privée de l’étudiant étranger : Elle refuse de renouveler les titres de séjour prétextant l'insuffisance de ressources, l'expiration de la carte de séjour, l'absence de logement ou s'arrogeant un droit de regard sur le parcours universitaire. Elle juge seule, de façon arbitraire et sans aucune compétence ni légitimité pédagogique, du « sérieux » (changement d'orientation justifié) et de la « réalité » des études suivies (justificatifs d'absence aux examens obligatoire). Il s'est constitué le Réseau Université Sans Frontière (RUSF) pour briser l'isolement des étudiants qui se retrouvent sans-papiers et faire échec à des réglementations absurdes.
 
L'assistance sociale devient alors le dernier recours des précaires avec le Fonds de Solidarité Universitaire (FSU).
Cette précarité engendre inéluctablement un faible taux de réussite et la fuite des « cerveaux » vers les pays anglo-saxons, en Amérique du Nord au détriment de leur pays d'origine en proie à une pénurie de cadres, d'élites performantes et soucieuses de l'intérêt général. Certains sont obligés de se réinscrire dans différentes filières pour maintenir leur statut légal en France après leur cycle d’études. Le besoin ébranlant la vertu, d'autres deviennent des proies faciles pour la délinquance, des filières mafieuses (drogue, prostitution, etc.).
2) Stigmatisation des immigrés et xénophobie au sommet de l'Etat
 
On constate malheureusement une démarche constante et cohérente de stigmatisation des immigrés. En effet, 10 lois sécuritaires ont été promulguées dont 6 relatives à l’immigration et au droit d’asile :
 
- Loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 : maîtrise de l’immigration et à l’intégration.
 
- Loi n° 2003-1176 du 10 décembre 2003 relative au droit d’asile.
 
- Loi n° 2006-396 du 31 mars 2006.
 
- Loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration.
 
- Loi Hortefeux du 23 octobre 2007 : le regroupement familial.
 
- Loi Besson du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité.
 
Par ailleurs, il est à déplorer l'existence de mai 2007 à janvier 2009 du ministère dit de « l'Immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire » alors que l’identité nationale qui est une notion extensive n'a pas à être liée au concept de l'immigration.
 
Le discours scandaleux et ignominieux de Dakar sur l’homme africain de Sarkozy dénote l'état d'esprit sur l'Homme noir : « Le drame de l'Afrique, c'est que homme africain n'est pas assez entré dans l'histoire » .
Des dérapages verbaux ont été systématiquement proférés pour stigmatiser les immigrés de la part de détenteurs de ministères régaliens.
 
Le ministre de l'intérieur Brice Hortefeux sur les arabes : « Il en faut toujours un. Quand il y en a un ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes »
Condamné en première instance à 750 € d'amende, il fut relaxé en 2011 par la cour d'appel qui avait rejeté le pourvoi du MRAP.
 
Le ministre français de la Défense et des Anciens combattants Gérard Longuet avait estimé mercredi 10 mars 2010 qu'il valait mieux nommer quelqu'un « issu du corps français traditionnel » plutôt que le socialiste Malek Boutih pour remplacer Louis Schweitzer à la présidence de la HALDE.
 
Harlem Désir du PS, s'était dit « scandalisé » : « Ces propos sont, bien plus qu'un dérapage, une véritable théorie raciale totalement contraire à l'idée de la nation républicaine et à l'égalité des droits entre les citoyens de toutes origines (...) C'est une hiérarchisation délirante des Français selon leurs origines » .
 
Le sociologue Didier Lapeyronnie, dénonçant ce racisme et cette xénophobie, remarqua que « La parole s'est décomplexé au plus haut niveau de l'Etat » .
Dans une interview à l'hebdomadaire d'extrême droite « Minute » en novembre 2011, le « récidiviste » G. Longuet issu du mouvement d'extrême droite « L'Occident » , avait jugé que Marine Le Pen était un « interlocuteur possible » .
 
La mutinerie et l’incendie du centre de rétention de Vincennes qui causèrent la mort d’un tunisien sont révélateurs du traitement indigne infligé aux sans-papiers .
3°) Le modèle d'intégration dans l'impasse
 
Le modèle d'intégration républicain qui a fait ses preuves pendant plus d'un siècle a cessé de produire le même résultat depuis deux ou trois décennies, générant des frustrations et des tensions qui menacent la cohésion même de la société française. On avait cru que le message était passé après les émeutes de 2005 à Clichy-sous-Bois et en 2007 à Villiers-le-Bel, mais très vite l'ordre établi a repris le dessus.
 
le rapport de Simone Veil, remis le 17 décembre 2008, sur la réforme du préambule de la Constitution de 1958 commandé par Nicolas Sarkozy recommanda de ne pas y introduire le concept de la diversité.
a) Les résultats sont accablants :
 
- Net recul des naturalisations : En 2011, le nombre d'étrangers naturalisés s'est effondré de 30 %.
 
- Hausse record des éloignements : l'objectif est fixé à 35 000 éloignements pour 2012, soit trois plus qu'en 2002.
 
- Moins de titres de séjour accordés dont l'attribution a diminué de 3,6 % pour passer à 182 500 en un an. Parallèlement, les flux du travail ont baissé de 26 %, et les titres de séjour délivrés pour « liens personnels et familiaux », ont chuté de 14 %.
 
- Baisse du taux de reconnaissance du droit d'asile.
 
- Le « plan Espoir banlieue » de Fadela Amara, alors secrétaire d’Etat à la ville, lancé en 2008 fut un mirage, une arlésienne faute de moyens budgétaires. Il devait permettre à plus de 100 000 jeunes issus des quartiers difficiles de trouver un job ou une formation qualifiante ou de créer leur petite entreprise. Selon le bilan réalisé en avril 2010, seuls 26.500 contrats d’autonomie ont été signés, à peine 2.800 contrats d’alternance et 3.500 stages.
C'est le blocage de la machine intégrationniste et de l'ascenseur social français.
b) L'assimilation des Noirs à la délinquance, à l'irrespect de la loi et aux violences : Selon les statistiques pénitentiaires, au 31 décembre 2006 il y avait dans les prisons françaises 1 827 étrangers africains (hors Maghreb) détenus, soit 3 % de la population pénale. Ce sont des immigrés de la seconde, voire de la troisième génération, juridiquement français grâce à la bi-nationalité mais principalement d’origine maghrébine ou noire.
 
Lors des émeutes de 2005 comme de 2007 qui bouleversèrent les banlieues, les jeunes Noirs africains furent nombreux parmi les émeutiers. L’un des ministres du gouvernement Villepin, Gérard Larcher, fit indirectement allusion à l’origine raciale de beaucoup d’émeutiers en parlant « d’enfants de polygames ».
La réalité est effectivement là : dans ces émeutes beaucoup de jeunes originaires d’Afrique Noire jouèrent un rôle important. Tout comme dans les bagarres de bandes et les agressions de lycée. Même si le phénomène est difficile à quantifier, tout concourt à créer le sentiment d’une domination physique africaine dans les banlieues, les collèges et les transports publics avec le regroupement fréquent des jeunes Africains en bandes, parfois. ethniquement mixtes mais qui ont comme chef un immigré d’origine dans la quasi-totalité des cas.
 
A cela il faut ajouter le recrutement préférentiel par les grandes surfaces commerciales de vigiles d’origine africaine.
 
Ajoutons qu’il y a souvent une relation entre les vigiles et les bandes, les supermarchés et les sociétés de sécurité recrutant parfois leurs gardiens parmi les groupes susceptibles de les spolier et dont ils achètent ainsi la « protection « , renforçant de fait l’emprise des bandes sur les territoires qui font souvent l’objet d’une stigmatisation de la part des médias et de l’appareil d’Etat.
 
Par ailleurs, les immigrés sont lésés par le revenu de solidarité active (RSA), initié par l'ex- haut commissaire aux solidarités actives Martin Hirsch : « Ce dispositif, représente un moins-disant pour les étrangers non ressortissants de l’Union européenne » selon le GISTI (groupe d’information et soutien des immigrés), une association de défense des travailleurs immigrés qui avait lancé l'alerte et dénoncé ce qu’il appelle une « xénophobie d’Etat » en énumérant les cas de figures pour lesquels la législation sera désormais plus contraignante (cf. l’article L 262-4, alinéa 2, sur les conditions d’éligibilité).
4) Les difficultés d’intégration venant de l’immigration africaine
 
Loin de s’intégrer, beaucoup d’immigrés ont tendance à se réenraciner dans leur culture et leur civilisation d’origine comme pour les maghrébins :
 
- La polygamie concerne 180 000 personnes en France.
 
- L’excision : des ethnies africaines venant du Mali, de Guinée, du Soudan ou de la Corne de l’Afrique ont apporté avec elles cette pratique qui heurte profondément les sensibilités européennes, féministes et humanistes défenseurs de l'intégrité physique des femmes, contre des pratiques mutilantes. Selon la revue de l’INED, il y avait en France, en 2004, environ 50 000 femmes adultes excisées. Une dizaine d’hôpitaux et de cliniques y proposent des chirurgies réparatrices. Le gouvernement avait lancé, le 14 avril 2009, une campagne nationale de communication pour lutter « contre les mariages forcés et les mutilations sexuelles » .
V/ INITIATIVES NATIONALES ET LOCALES POUR UN MEILLEUR ACCUEIL ET L'INTEGRATION DES ETUDIANTS ETRANGERS
1°) Des réponses institutionnelles
a) Des rapports à profusion, à la pelle ont été commandés par le gouvernement aux ministères concernés par la problématique de l'attraction, de l'accueil et du suivi des étudiants étrangers en France. Le premier rapport date de 1997 avec celui de Patrick Weil, puis d'Albert Prévos, de Bernard Dufourg et d'Alain Claeys en 1999, d'E. Flitti en 2000 et d'E. Cohen en 2001, entre autres.
b) Création le 7 mars 2007 de l'agence Campus-France pour accroitre l’attractivité de la France et conforter sa compétitivité : Un opérateur unique a été créé pour reprendre et fédérer les missions jusqu'ici exercées par l'agence EduFrance, l'association Egide et le CNOUS.
 
L Espace Campus-France Guinée est dans les locaux du Centre culturel franco-guinéen de Conakry. Pour la rentrée scolaire 2012-2013, après l'avis du SCAC, seuls 420 visas sont prévus pour la Guinée, mais 5000 pour chaque état du Maghreb.
2°) Des initiatives locales et associatives
Des initiatives locales sont entreprises pour favoriser l'accueil, l'intégration des étudiants étrangers et atténuer le pouvoir discrétionnaire des préfectures : l'exemple des villes de Bordeaux et Lille est à souligner.
L'Espace Rentrée Etudiant (ERE) organisé par des universités et le CROUS.
 
- Les associations d'étudiants africains restent les principaux acteurs de l'aide apportée aux étudiants étrangers, surtout primo-arrivants. Les cours de langue, l'accueil des étudiants étrangers dès leur arrivée à l'aéroport ou à la gare, l'aide à distance par courrier électronique pour conseiller et informer, la semaine d'accueil pour présenter les différents dispositifs de l'université et son environnement, la visite de la ville, un week-end d'intégration pour les nouveaux arrivés, l'aide aux démarches, le soutien pédagogique et parfois psychologique tout au long de l'année sont les nombreux exemples qui témoignent de l'investissement des associations étudiantes africaines. Ces associations sont soit communautaires regroupant des étudiants d'un même pays, soit supranationales.
 
Le CNJGF est un réseau crée en 2008 qui compte aujourd'hui 32 associations qui ont reçu, durant l'année 2011, 57 % des étudiants ayant obtenu un visa. Il organise notamment le « Week-end culturel et d'intégration » .
 
L’Association des Jeunes Guinéens de France (AJGF) et le Ministère de l’emploi, de l’enseignement technique et de la formation professionnelle représenté par l’Agence guinéenne pour la promotion de l’emploi ont organisé le premier forum d’emploi guinéen en France dénommé « Talents Guinée 2012 » les 9 et 10 Novembre 2012 .
 
L’idée centrale est de faciliter le retour au pays des Guinéens formés, des élites de la diaspora en Europe. Cette initiative est salutaire et à pérenniser. Mais en amont, au pays, il faudrait améliorer les conditions d'études.
De 1960 à 1980, tous les étudiants africains étaient boursiers, sauf les Guinéens. En 2010, l 'Etat n'a alloué que 20 % à l'enseignement alors que les forces de sécurité ont eu plus de 30 %. En comparaison, le Sénégal a alloué 40 million € pour l'université Cheikh Anta Diop, 600 € par étudiant, mais seulement 125€ en Guinée.
« L'avenir de l'Afrique passera par la régionalisation de ses universités. Ce sera sa force » préconisait L'historien, anthropologue et homme politique sénégalais Cheikh Anta Diop (1923-1986). C’est un levier essentiel pour assurer l’indépendance réelle et le développement efficient des Etats africains.
CONCLUSION :
 
Malgré leurs conditions de vie précaires, les immigré africains sont une chance, une aubaine pour leurs pays d'origine. Ce sont des acteurs de développement qui ont contribué à la création de richesses, de croissance économique, notamment dans :
 
- L’envoi de l’épargne des migrants, un flux financier plus important que l’aide publique au développement émanant des pays riches du Nord.
 
- La réalisation de missions de service public : la construction et la réhabilitation d’écoles, de bibliothèques, de maternités, de centres de soins primaires, de logements individuels et collectifs ; l’envoi de médicaments, d’ouvrages ; la dispense des cours (cf. le TOKTEN avec l’association guinéenne ACTOG ).
 
Ces migrants sont une fierté de l'Afrique : bon nombre d'entre-eux ont excellé et réussi dans différents domaines : le sport, les arts et l
  • Aucune note. Soyez le premier à attribuer une note !

Ajouter un commentaire