Paris «capitale du monde» avec une marche historique contre le terrorisme

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Paris, «capitale du monde» contre le terrorisme: des centaines de milliers de personnes et une cinquantaine de chefs d’Etat et de gouvernement convergeaient dimanche pour une marche immense et inédite d’hommage aux 17 personnes tuées par trois jihadistes français.

Dirigeants du monde entier, partis, syndicats, groupes religieux juifs, chrétiens, musulmans, associations, personnalités vont accompagner cette foule monstre. Tout semble ainsi réuni pour faire du 11 janvier, avec sa marche républicaine, un jour historique.

«Paris est aujourd’hui la capitale du monde», a salué François Hollande à la mi-journée. «Le pays tout entier va se lever vers ce qu’il a de meilleur».

La place de la République était déjà noire de monde avant 13H00, soit plus de deux heures avant le début officiel du début de la marche (15H00).

Plusieurs dizaines de milliers de personnes, dont des enfants, s’étaient amassées autour de la statue centrale de la place de la République, avec de nombreuses pancartes «Je suis sur place». «Charlie, Liberté!», a scandé la foule, où flottent de nombreux drapeaux français vendus à la sauvette. Des Marseillaise s’élèvent de temps à autres.

C’est «un vrai signe de la force de la France. Que la France, elle est forte, elle est unie contre toutes ces personnes» extrémistes, se réjouit Lassina Traoré, un Français de 34 ans de confession musulmane venu lui aussi très en avance.

Cette marche était au départ un hommage aux victimes de jihadistes revendiqués, à commencer par les irrévérencieux dessinateurs de Charlie Hebdo massacrés mercredi, puis une jeune policière tuée jeudi, et quatre Juifs assassinés dans une supérette casher vendredi.

Mais c’est aussi devenu progressivement un sommet à haute résonance diplomatique.

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, le président palestinien Mahmoud Abbas et le couple royal jordanien se joindront ainsi à François Hollande à partir de 15H00. De même que le président ukrainien, Petro Porochenko, et le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov.

Avant M. Hollande, seul un président français avait déjà participé à une manifestation de rue: François Mitterrand, en 1990, après la profanation du cimetière juif de Carpentras.

Le défilé, avec deux parcours pour permettre de drainer la foule immense, se tiendra entre République et Nation, deux grandes places de l’est parisien distantes de trois kilomètres.

Participeront aussi huit présidents africains et les plus hauts dirigeants européens, d’Angela Merkel à David Cameron, de Mariano Rajoy à Jean-Claude Juncker en passant par Matteo Renzi. Le président des Etats-Unis, Barack Obama, ne sera pas présent. Mais Washington est solidaire de Paris: «Aucun acte de terrorisme n’arrêtera jamais la marche de la liberté», a salué dimanche le secrétaire d’Etat, John Kerry.

Des dirigeants plus controversés, comme Viktor Orban (Hongrie) ou Ali Bongo (Gabon), ont aussi fait le voyage. La Turquie sera représentée par le Premier ministre turc, Ahmet Davutoglu.

- 'Mobilisation internationale' -

Au total, ce sont près de 50 représentants étrangers que François Hollande recevra à l’Elysée avant de rejoindre avec eux la manifestation, en minibus.

Les journaux français ont lancé cette journée avec un appel unanime d’unité: «Marcher contre la terreur» (Le Monde), «Le monde se lève» (JDD), «Ensemble» (Aujourd’hui en France/Le Parisien). Libération paraît exceptionnellement avec en Une le «Je suis Charlie» emblématique de la mobilisation des Français.

A l’Elysée, même si on salue «la mobilisation internationale exceptionnelle» et l»'union nationale», on assure qu’il s’agit d’abord du «rassemblement du peuple français». Ce que confirme un sondage Ifop Paris Match: 97% des Français jugent nécessaire de faire preuve d’unité nationale.

«Ceux qui ont un fusil et qui tuent des gens sont lâches», explique Jean-Alain, 39 ans, à son fils Alessandro, 7 ans, sur la place de la République. «On voulait venir ici pour que ce soit concret pour lui, qu’il voie qu’on pense tous la même chose», explique le père.

Un panneau signalétique collé sur la statue centrale rebaptise la grande place parisienne «Place de la liberté d’expression». Tous les panneaux publicitaires sur le parcours affichent «Je suis Charlie».

«Vous voyez mes cheveux blancs? Je n’ai pas manifesté depuis mai 68 parce que j’en ai trop fait (des manifs) à l’époque. Mais, cette fois-ci, c’est trop important: j’y vais», explique les larmes aux yeux Chantal, retraitée de 65 ans croisée par l’AFP dans le XIe arrondissement tout proche.

Dans le cortège, les familles des victimes doivent marcher en tête. Suivront le chef de l’Etat et les hôtes étrangers, puis les personnalités politiques françaises.

Tous les partis seront là, à l’exception du Front National. Marine Le Pen, qui n’a pas été invitée formellement, a appelé à manifester en province et non à Paris. Elle sera à Beaucaire, une mairie d’extrême droite.

De nombreux rassemblements sont en effet également prévus dans les régions, notamment à Lyon, Bordeaux, ou Reims. Comme samedi, des rassemblements doivent aussi avoir lieu à l’étranger, à Londres, Berlin ou Washington notamment. Décalage horaire oblige, le premier rassemblement dominical s’est tenu en Nouvelle-Calédonie, où 4.000 personnes se sont retrouvées à Nouméa.

Les mobilisations impressionnantes, samedi, dans les grandes villes de province - 700.000 personnes en tout, selon l’Intérieur -, semblaient augurer de chiffres massifs, d’autant que le ciel est bleu vif.

«Plusieurs centaines de milliers» de manifestants, a prudemment avancé Bernard Cazeneuve, «des millions», prévoit le Premier ministre, Manuel Valls.

Le record depuis la Libération reste la liesse collective de quelque 1,5 million de personnes dans les rues de la capitale pour la victoire au Mondial de football de 1998.

Sur fond de plan Vigipirate en «alerte attentat», les mesures de sécurité sont draconiennes avec 2.200 hommes mobilisés, 10 stations de métro fermées, le stationnement interdit. Plus de 3.300 autres sont chargés de protéger les sites sensibles (médias, lieux de culte, écoles confessionnelles, bâtiments publics, ambassades...)

Dimanche matin, en Allemagne, un quotidien de Hambourg, qui avait publié des caricatures de Mahomet venant de Charlie Hebdo, a été la cible d’une attaque avec un engin incendiaire, sans qu’il y ait de blessés.

- Rendez-vous à l’Elysée -

La couverture médiatique s’annonce elle aussi exceptionnelle: plus de 1.000 journalistes accrédités pour couvrir cette marche.

A l’Elysée, François Hollande a d’abord reçu dimanche matin, avec son Premier ministre, les représentants de la communauté juive, toujours plus inquiets après la prise d’otages sanglante, porte de Vincennes, vendredi. Le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), Roger Cukierman, a évoqué une «situation de guerre». Des militaires, et non plus seulement des policiers, protègeront d’ailleurs «si nécessaire» écoles juives et synagogues, a promis le gouvernement.

En soutien, le président Hollande se rendra également à 19H00 à la Grande synagogue de Paris, rue de la Victoire.

Vers midi, le gouvernement s’est retrouvé au complet à l’Elysée. Suivent à partir de 13H00 les ex-présidents et ex-Premiers ministres français, de même que les dirigeants étrangers.

Si Valéry Giscard d’Estaing et Jacques Chirac ont décliné, Nicolas Sarkozy sera présent. Et les ex-chefs de gouvernement seront au complet, de Michel Rocard à Jean-Marc Ayrault, en passant par Alain Juppé ou Lionel Jospin.

Chargé de sécuriser le cortège monstre - sur fond de nouvelles menaces formulées contre la France - Bernard Cazeneuve, a lui conduit en fin de matinée une réunion internationale sur le terrorisme avec 11 ministres de l’Intérieur européens et le ministre américain de la Justice, Eric Holder. La Belgique s’est dite favorable à une «liste européenne des combattants étrangers» ralliant le jihad.

Source: AFP

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