Verdict de la cour d’assises : le fils d’AOB réagit …

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A l’issue de la condamnation de son père à la réclusion criminelle à perpétuité, M Diallo Abdoul Aziz, fils aîné du Commandant AOB, principal accusé dans  l’affaire de «  l’attaque du domicile du président Alpha Condé », nous a fait part de ses sentiments. Témoignage poignant ! Exclusivité.

Oury Baldé : Quelles sont vos impressions à la condamnation de votre père (AOB, ndlr) à la réclusion criminelle à perpétuité ?

Abdoul Aziz Diallo : … (Il hésite et  pousse un long soupir) abattu, effondré, extrêmement déçu et peiné à la fois pour mon père, pour ma famille mais aussi pour le peuple de Guinée.

 

Je rêvais d’une vraie justice pour mon pays, tout en m’attendant en même temps au pire, car  je doutais de l’indépendance de la justice guinéenne.

Les gages de transparence donnés au départ avec l’accès du public aux audiences et  la médiatisation du procès, n’étaient au fait que de la poudre aux yeux. La cour a prononcé des condamnations sévères à tout va, sans preuve.AOB et tous les autres condamnés sont innocents. L’apport des avocats de la défense a démontré qu’aucun des accusés n’était impliqué dans les faits qu’on leur  reproche. Les débats ont même mis en doute la véracité de cette soi-disant attaque du domicile privé du président de la République.

 

On attend d’une justice qu’elle dise la vérité. À défaut de ne pas dire la vérité sur ce dossier en montrant au peuple de Guinée les véritables commanditaires, les exécutants et les motifs réels de cette pseudo-attaque, nous espérions la libération de tous ces innocents  arbitrairement arrêtés. Tous ceux qui ont suivi le procès, ont du s’apercevoir que la délibération n’était pas en rapport avec les débats lors des audiences. La cour a tout fait pour travestir la vérité. Tenez ! Par exemple, la  vidéo projetée en salle, où apparait Pivi et ses hommes entrain de charger des armes dans le véhicule du Cdt AOB, a été diffusée  avec le son coupé.  Dans cette même vidéo projetée à la demande de la défense, on pouvait entendre   Pivi  clairement dire de charger des armes  dans le véhicule d’AOB, et Tiegboro intimer à ses complices de poser « les grenades  par ici pour la communauté internationale ». (Cette vidéo est disponible sur ce lien  http://www.youtube.com/watch?v=xqws_TiARmI).

La cour  d’assises n’a pas  réellement cherché à savoir la vérité dans cette affaire, elle a agi vraisemblablement sous influence, en envoyant de simples innocents en prison. Sinon malgré cette vidéo pourquoi :

1)     les principaux acteurs y apparaissant n’ont pas été entendus par la cour ?

2)     Ces personnes sont-elles au-dessus de la loi ?

3)     Pourquoi, malgré cette vidéo pourtant très explicite, la cour a-t-elle retenu contre le Cdt AOB le délit de détention illégale d’armes de guerre et de munitions ?

A cause de ce grave manquement de notre justice, le peuple de Guinée risque de ne pas connaitre les vrais commanditaires et les vrais mobiles de cette attaque. Et en procédant de la sorte, le peuple tout entier a été trahi par sa propre justice.

Comment envisagez-vous la suite ? Vous attendez-vous, à l’issue du pourvoi en  cassation qu’entendent mener les avocats de la défense, à ce que votre père bénéficie de la grâce présidentielle ? La solliciterez- vous au près du président AC ? 

On va se pourvoir en cassation, en osant  espérer  que  les autorités judiciaires de ce pays vont se ressaisir et dire le droit, tout le droit, rien que le droit.

 

Concernant la grâce, on  gracie un coupable, pas un innocent. Autrement ce serait cautionner toute cette mascarade orchestrée  au plus haut niveau. AOB et ses codétenus étant innocents,  nous attendons à ce qu’ils soient reconnus en tant que tels.

La justice est faite pour le peuple. Si cette justice n’est pas capable de dire le droit, c’est au  peuple de  se lever dans son ensemble pour réclamer la justice .Nous osons  croire  que la cour suprême va saisir l’occasion pour redorer le blason de la justice guinéenne et restaurer la  confiance des citoyens en elle.

 

La cour d’assises a failli dans ce dossier. Cette cour  a expressément dissimulé la vérité sur cette soi- disant  attaque du domicile du président  de la République. Certains innocents ont été libérés, d’autres condamnés à de lourdes peines, mais personne ne sait ce qui s’est effectivement  passé la nuit du 18 au 19 juillet 2011 au domicile du président AC, à Kipé.

 

Si des coupables existent dans l’affaire de l’attaque du domicile du président AC, ces derniers n’ont pas été traduits devant la justice. Ce que nous demandons au président de la République, plutôt que de gracier untel ou untelle, c’est de garantir l’indépendance de la  justice. Qu’AC demande aux magistrats guinéens de dire le droit même s’il se trouve que c’est le président de la République en personne qui est plaignant dans l’affaire. Nous avons  encore quelques jours devant nous pour le pourvoi en cassation. Le président de la République a donc le temps et les moyens de le faire. N’est-ce  pas lui qui a déclaré l’année 2013 en Guinée comme l’année de la justice ? En même temps, devrait-il cautionner l’injustice des magistrats dont le seul objectif est de lui faire plaisir en foulant aux pieds leur mission qui est pourtant sacrée- celle de dire le droit au nom du peuple de Guinée ?

Ce pourvoi en cassation est pour nous l’ultime espoir pour que l’ensemble des innocents injustement condamnés soient rétablis dans leurs droits. C’est également une grande opportunité pour que la justice guinéenne montre à la fois au peuple de Guinée et à l’opinion internationale qu’elle est digne de cette immense confiance qu’on porte en elle.  

 

La cour d’assises ayant rendu son verdict, le peuple de Guinée et la communauté internationale ont vu les limites de cette justice : une justice aux ordres, une justice corrompue,  une justice du plus fort.

Si à l’issue  du pourvoi en cassation, la justice guinéenne à travers la cour  suprême passe de nouveau à côté de sa mission, alors le peuple tout entier devrait récuser cette justice, partiale et à double vitesse, et demander sa dissolution pure et simple.

Avez-vous  un dernier message à faire passer?

 

Nous fondons un grand espoir sur ce pourvoi en cassation que  nos avocats vont introduire, en espérant qu’ils réussiront à nous rétablir dans nos droits.

 

Aujourd’hui si le peuple de Guinée est divisé c’est parce qu’il y a eu trop d’arbitraire dans le pays. Le préalable de toute réconciliation nationale serait donc l’instauration d’une justice pour tous. Comment pouvons-nous devenir un Etat démocratique,  en n’étant pas un véritable Etat de droit ?

 

Tout ça pour dire au peuple de Guinée que nous avons tous besoin d’une véritable justice dans notre pays. Avec une justice de forme telle que nous l’avons aujourd’hui,  notre pays est condamné à vivre dans la misère.

Nous lançons un appel au peuple de Guinée, à son président, aux responsables religieux, à l’opposition, aux organisations de défense des droits de l’homme, à la communauté internationale à nous venir en aide pour que nos parents recouvrent leur liberté. Nos familles sont déchirées depuis plus de deux (2)  ans. Aidez-nous  à nous reconstruire. Faisons en sorte qu’une telle injustice ne se reproduise plus jamais dans notre pays.

Je profite de l’opportunité qui m’ait donné pour remercier toutes les personnes de bonne volonté qui nous ont témoigné et continuent de nous témoigner leur soutien durant ces moments de grande difficulté.

 

Je voudrais remercier tout  particulièrement Me Amadou Oury Diallo et ses collègues qui ont couru d’énormes risques pour eux-mêmes et pour  leurs familles, en acceptant de défendre mon père ainsi que tous les autres accusés, sans demander la moindre contrepartie financière.

Ces valeureux avocats ont réussi à démonter pièce par pièce le caractère fallacieux de ce montage grossier et cynique.

C’est aussi l’occasion de remercier les autorités françaises (en particulier M Alain Juppé) pour leur implication au début de cette affaire afin que le commandant AOB reçoive les meilleurs soins possibles à l’heure où il  était entre la vie et la mort.

Grand merci également aux médecins et infirmiers militaires qui ont administré les meilleurs  soins à mon père.

Un appel au président de la République. M le Président, vous êtes aujourd'hui entouré par des cadres qui ne pensent qu'à leur intérêt personnel au détriment de la paix, de la justice, de la démocratie et du développement économique et social, qui vous tiennent tant à cœur. Ces individus sont capables de tout pour rester dans vos faveurs, y compris tuer et  faire emprisonner de paisibles citoyens guinéens. Ils ont œuvré, pour la plupart d’entre-deux, auprès de vos prédécesseurs. Ce qui explique l’échec de ces précédents régimes.

Croyez- moi, M le président, si vous ne faites rien pour vous débarrasser des ces cadres malveillants autour de vous, votre passage à la tête de l'Etat se soldera par un échec et une profonde division du peuple de Guinée. À ce moment là, vous serrez tenu pour seul responsable et comptable de cet échec. Et ces mauvais cadres, ennemis de la Guinée,  dans votre entourage  seront les premiers à s’en réjouir.

 

Enfin,  je ne saurais terminer cette allocution sans remercier mon père, le Cdt AOB, pour son courage et sa détermination à rester en vie malgré toutes les souffrances du monde qu’il a endurées, afin de pouvoir laver notre dignité et sauver l’honneur de notre famille .

 

Cher père, tu es et tu resteras toujours cet homme idéal qui m'inspire. Je veux que tu saches que tes enfants sont fiers de toi. Peut-être que nos dirigeants actuels pensent  que tu as  retardé leur arrivée au pouvoir. En contrepartie de ta loyauté, notre Guinée que tu aimes tant et que tu as tant servie, à travers sa « justice »  te récompense par la prison. Mais Dieu ne dort pas et comme tu aimes à le dire je cite «  quel que soit le temps que cela va prendre, le bien finira par vaincre le mal; la vérité triomphera sur le mensonge et la justice écrasera l'arbitraire » fin de citation. J’ai conscience de ta foi en Dieu et des valeurs qui sont les tiennes : la loyauté, le courage, l’honnêteté. Tiens bon car le bon Dieu te rendra justice ici-bas peut-être et à l’au-delà, certainement.

Transmis par Oury Baldé

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