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Guinée: Hommage aux victimes du 28 Septembre 2009 - Soif de Justice (partie 2)

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Si Moussa Dadis Camara et son Conseil National pour la Démocratie et le Développement (CNDD) étaient le problème en 2009, aujourd'hui (2012) le pouvoir est aux « Forces Vives », de l'époque, devenues : Président de la République, chefs des institutions, membres du gouvernement et leaders de l'opposition ? Les élections qu'elles nous ont négociées en 2010, au prix de nos cadavres, ont achevé la destruction du semblant d'unité nationale qui prévalait, il s'agit maintenant de savoir : QUAND et COMMENT reprendre la nation à zéro ? Parce que « personne » ne veut, pour l' instant, tirer les leçons de notre lourd passé ?

J'avais voulu me taire par déception mais à la mémoire des meilleurs d'entre-nous, morts sans aucune forme de calculs pour la gloire de notre ingratitude, voici, avec quelques amendements (précisions et quelques corrections), la 2ième partie de cette série, écrite le lendemain de ce massacre, pour hurler ma soif de Justice, pour nos morts, et de Thérapie Collective. Puisse le Tout Puissant, Meilleur Juge, leur accorder paix et liberté éternelles !

En lisant, interrogez-vous, SVP : Depuis, qu'est-ce qui a changé, outre quelques noms, titres ou sigles et qu'avons nous fait individuellement et collectivement ? N'est-il pas temps que chacun reconnaisse et assume sa part de responsabilité ?

« Point de négociation, il faut arrêter la bêtise collective (2eme partie)» :

Tôt ou tard, chaque être, chaque société devra faire face à ses démons et faire un choix qui déterminera le reste de sa destinée. Les nôtres ont (pour le moment) pris le dessus, ils détiennent la boussole et le gouvernail, le contrôle, nous pouvons les affronter maintenant ou remettre ça aux calendes grecques, mais ils continueront de nous habiter. Nous ne pourrons pas éternellement contourner notre destin commun.

Avant de soumettre ce que l’on pourrait appeler « propositions », je souhaite faire, dans cette deuxième partie, un résumé de la « bêtise collective » que j’ai voulue dénoncer dans la première partie et tous les textes que j’ai rédigés depuis, le 23 décembre 2008 (date de la prise du pouvoir par les militaires du CNDD ). J’avais voulu la consacrer à la bête en furie, dénommée Dadis, que nous avons laissée en liberté, mais il ya déjà plusieurs articles qui traitent d’elle. Leurs auteurs m’ont rendu un sacré service !

Retenons, pour l’instant, qu’en hésitant nous rendons service à ces voyous. Cette barbarie a bel et bien été préméditée et planifiée d’avance. Mon souhait, comme je le disais précédemment, n’est pas de faire la morale à quelqu’un de particulier mais il faut savoir d’où nous sommes partis, dans le désordre, pour définir l’horizon commun, dans l’unité.

2— Toujours le pire des Scénarios :

En 2006, la prise de pouvoir par l’armée fut l’un des principaux scénarios de sortie de crise mis en évidence par le CNOSCG (Conseil National des Organisations de La Société Civile), y compris les partis politiques. Ce conseil a préféré croiser les bras et attendre que le pire des scénarios se réalise : une course à la recherche d'une frange républicaine de l' armée, fût lancée. En début d’année 2009, j’avais écris, à quelques reprises, que beaucoup de nos compatriotes se gonflaient lâchement la poitrine en revendiquant la victoire dans un combat auquel ils n’ont pas participé. Une supercherie, à laquelle un nombre négligeable de bandits fut associé, devint le symbole d’une lutte nationale jamais menée. En effet, certains non-initiés et peu connaisseurs

de la bande au pouvoir ont estimé qu’elle leur accorderait une faveur individuelle en les débarrassant de certains fléaux qui gangrènent la société, mais particulièrement de leurs « adversaires ». Haine et opportunisme !

Détrompez-vous, je ne fais pas allusion qu’aux leaders politiques, nous sommes tous concernés. Chacun voulait y trouver son compte au point que nous nous sommes retrouvés dans une situation d’immobilisme collectif en espérant/souhaitant que le CGS (CNDD, GOUVERNEMENT et SOUTIENS, je les appelle ainsi pour ne pas en oublier un seul et éviter d’alourdir les textes en citant des noms) et ses balles feront une distinction à l’avantage des uns, contre les autres.

Ils viennent de tirer dans le tas !

Nos valeurs intellectuelles, morales, culturelles et traditionnelles furent mises de côté :

Leaders politiques, religieux, syndicaux et autres se lancèrent dans une course d’appropriation des nouveaux parvenus (CGS), chaque groupe voulant en faire son arme. La « victoire » devait être celle de tous et personne à la fois, nous en connaissons maintenant les uniques bénéficiaires. La crainte, la peur d’agir et d’entreprendre - si ce n’est pas un manque de vision, de sincérité, d’engagement et de patriotisme - de l'ensemble de notre leadership, l’amène à accepter le mal pour vaincre le mal. Une aberration !

Malgré ce que nous venons de vivre, et selon les informations qui me parviennent, certains continuent de croire à une solution militaire à la crise que nous connaissons : Quelque soit le vainqueur parmi les fauves, il restera cannibale. Retenons-le une fois pour toutes, chers compatriotes. Lansana Conté disait qu’il a « déjà tué et pouvait le faire encore et encore ». Celui qui arrive par les armes gouvernera par les armes, ce sont ses seuls arguments.

* Des individus qui se prétendent religieux et sages ont livré leurs filles à la prostitution, à peine déguisée, auprès de la junte ; ils côtoient alcooliques et drogués lorsqu’ils sont dans l’antre du diable et préfèrent lui inventer, de leur propre chef, des circonstances atténuantes.

* Des « hommes politiques », revendiquant des parcours académiques et professionnels des plus enviables, discutent d’affaires d’État avec des « incultes » ; ils se soumettent aux caprices d’ignobles vagabonds qui préfèrent leurs va-nu-pieds d’anciens promotionnaires de « maquis », et autres coins sombres de Conakry, constituant leurs clubs de soutiens.

* Les syndicalistes tolèrent les gaspillages outranciers de ces voleurs, et mettent en berne les revendications légitimes de ceux qu’ils représentent.

* Des « intellectuels » inventent de bonnes vertus à un groupe qui symbolise tout ce qu’il y a d’échec dans une société, qu’elle soit occidentale ou africaine ; nos valeurs ancestrales sont devenues légendes et celles dites modernes, utopiques.

Bref, tout ce qu’il y a de mauvais est normal en Guinée pourvu que tel soit écarté, injurié, enfermé, humilié, tué : ce n’est que drôle. J’ai pourtant cru que l’exercice du pouvoir, quelle que soit la « situation d’exception », exige un certain minimum de valeurs intellectuelles, morales, culturelles : humaines en gros. Je ne parlerais pas de l’ethnocentrisme !

N’est-ce pas le monde à l’envers ? Serait-ce le rêve guinéen, qu’un voyou soit chef d’État par terrorisme ?

Mais le drame guinéen ne s’arrête pas là :

* Quelle que soit l’ampleur du crime, il y’a toujours quelqu’un pour venir débattre et faire le malin : Négocier, qu'ils appellent ça. Des porte-paroles du désespoir, qui voient une occasion d’autopromotion sur les cadavres des autres, aux pèlerins de grosses déclarations

internationales, tout y passe comme à Hollywood, pourvu que ça fasse intellectuel et important.

* L’impunité est devenue une culture, pourvu qu’elle ait la bénédiction des Conseils de Sages et autres Coordinations Régionales, à 100 millions de francs la séance.

* Et pendant qu'on assassine des innocents, nous débattons et radotons, espérant sournoisement que quelqu’un d’autre vienne nous guérir du mal que nous avons fabriqué et entretenu.

* Malgré les pénibles évènements que nous venons de vivre, d’autres s’amusent encore à comparer l’irréparable à l’éphémère (crimes de sang vs crimes économiques). Leur soif de voir d’autres se faire humilier ne peut être désaltérée par le sang des martyrs.

* Par bonne ou mauvaise foi, même lorsque nous nous disons neutres ou opposés à certaines bêtises, nous nous laissons entrainer par les évènements sans mesurer l’impact de nos actions : c’était le cas par exemple de notre poétesse nationale, Zena Koumanthio Diallo, au stade de Labé (lors de la réception de Dadis et acolytes), même si le contenu du poème qu' elle y a lu laisse un doute quant à ses réelles motivations, le groupe CGS en a fait une bonne récupération. La cooptation de telles personnalités ne consiste qu’à donner un certain crédit à l’évènement, tromper des esprits sensibles.

* Certains commis aux réactions et commentaires, « cagoulés » par les termes grandiloquents de démocratie, dialogue apaisé, liberté d’expression et d’opinion dont ils n’ont (la plupart) jamais connu le sens, commencent déjà à soutenir l’idée d’un gouvernement d’union nationale dirigé encore par les mêmes bandits : ils veulent inventer des navettes de sortie pour l’un ou l’autre du CGS. Reconnaissons-leur la « liberté de s’exprimer », mais sommes-nous obligés de faire les fous avec eux ? Je dois dire mon inquiétude parce que mes compatriotes commencent encore à en débattre et à réagir. Les connaissant je ne serai pas surpris qu’au nom de la paix et du semblant d’unité nationale que prônent les insensés, ils acceptent des rabais empoisonnés, en négociant : ce sera le plus grand coup à porter à cette prétendue unité.

* D’autres préfèrent « attaquer » les opinions, et non discuter ou débattre, parce qu’admettre la vérité mettrait leur « ethnie en danger ». Ils ont fait du CGS un outil de combat.

* Ce n’est qu’au moment où le pire scénario devient réalité sanglante, que nous Guinéens décidons de faire le minimum. En témoignent toutes les grosses marches organisées à travers la planète : je ne veux pas faire le « rabat-joie » mais lorsqu’il y a des morts, une marche ne suffit plus. Il nous en faudra beaucoup plus, pour oser parler d’eux avec honneur (c' est avant qu' il aurait fallu commencer à marcher).

L’allure étant comprise, à mon avis, je ne parlerai pas de toutes les bêtises collectives de ces derniers mois, années ou décennies.

Dadis n’est que la personnification du mal qui gangrène toute la société guinéenne (la preuve: il est parti mais les crimes persistent) :

L’émanation du sentiment que le Guinéen nourrit pour son prochain, le résultat de la dominance de l’instinct sur la conscience, de la haine sur l’amour du prochain, de l’ivraie sur la vérité. Bref, la célébration de la victoire du mal sur le bien. L’incompétence, le mensonge, la roublardise, l’ethnocentrisme et surtout l’immobilisme collectif sont les traits dominants de notre société qui ne peuvent être mieux caricaturés que par le CGS. C’est le pire scénario que nous avons voulu unique solution. Nous allons trinquer !

Négocier avec le CGS c’est faire des compromissions avec le mal en nous-mêmes ; par contre, l’affronter est un exercice de thérapie collective ; le vaincre, une revanche du bien sur le mal qui nous guérira, tous :

Ces vagabonds sont en perte de contrôle d’un véhicule qu’ils ne seront jamais capables de conduire et ne cessent d’appuyer sur l’accélérateur ; allons-nous leur offrir un frein et le volant en plus ? Dadis n’est qu’une bête sanguinaire blessée qui sort ses griffes cassées de désespoir (il se disait désolé après le massacre, rien que ça) ; allons-nous panser ses plaies et lui tendre notre cou afin qu’il s’abreuve de plus de sang ? Parce qu’au cas où vous en douteriez, ils tueront encore et encore. Retenez-le !

Le pouvoir de ce régime est une grosse toile de parodies criminelles, tissée avec des fils du mal, que le CGS ne cesse de fabriquer. Vouloir séparer les bons fils des mauvais, c’est vouloir s’offrir en proie aux prédateurs, tous dangereux les uns autant que les autres. Ils sont tellement pris dans leur sale besogne, que rester dans la toile devient vital : ils ont désormais toutes les raisons sanguinaires de s’accrocher indéfiniment au pouvoir. Qu’ils s’entre-dévorent, par instinct de survie (ou cupidité), ne changera rien au danger que représente la saleté qu’ils ont voulu installer au sommet de l’État. Les survivants demeureront des éléments du pire scénario !

Petite Parenthèse: trois mois plus tard : L'aide de camp Toumba Diakité tirait sur son patron Dadis Camara, désormais exilé au Burkina ; Sékouba Konaté son ami , désormais riche et décoré en Éthiopie par l'Union Africaine et complices internationaux, remplaçait Dadis pour faire élire le premier conseiller de la junte, le désormais président de la république Alpha Condé qui, au risque de s'exposer , les protège tous face à justice ; Claude Pivi et Thiegboro Camara ( l' un des rares inculpé) qui juraient de « pourchasser Toumba jusqu' à l' éternité » sont bien silencieux derrière leurs fonctions avec rang de ministre. C'est du peuple qu'on s'est encore moqué !

Après ce diagnostic, que faire donc ? Outre la confrontation de nos démons, je ne vois pas réellement d’issue salutaire ou alternative pour reprendre le dessus, il n'y a pas de baguette magique pour nous sortir du drame. Je lis ici et là (très peu, heureusement) qu’il faut « dialoguer » et, de façon à peine voilée, « prendre du temps pour penser aux solutions » en espérant un miracle. C’est encore mal connaitre ce que couve Conakry, si nous n’affrontons pas ce mal maintenant et ensemble, c’est en rangs dispersés que nous le ferons plus tard contre une multitude de factions. À ce moment là, nous pourrons parler de « véritable somalisation » : l’autre pire scénario qui nous reste à vivre et, chose qui est certaine, ce ne sont pas des actions individualistes, isolées et uniquement documentées, qui nous sortirons de « l’auberge », encore moins de simples marches ici et là. Que dire du déni collectif que nous pratiquons si bien avec des déclarations du genre « la Guinée ne risque pas de connaitre de guerre comme les autres pays » ? J’en parlerai dans la prochaine livraison: Il faut organiser la résistance.

Fin de la partie 2, à suivre...

Ps: je rappelle que la Pétition en l'honneur des victimes du 21 Septembre 2012, notamment Alpha Amadou Barry et Fodé Mahmoud Bah tués par balles, est encore ouverte vous pourrez la lire, signer et partager en cliquant sur ce titre: Exigeons Justice pour nos victimes - Manifestons pour la vie d'abord.

Merci à tous ceux qui acceptent de signer ce message destiné aux principaux leaders de l'opposition réunis au sein du Collectif/ADP.

Boubacar Barros Diallo

Un enfant de « l'Axe du Mal », secteur de Bambéto-Cosa

Boubacar Barros Diallo

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