Les stigmates de l’immobilisme.

 

Pour une question de non satisfaction des attentes de la population, consécutive aux déviances par rapport à la feuille de route, issue des négociations tripartites de sortie de crise en 2007, le départ de M.KOUYATE ancien P.M, qui a failli à sa mission de réconciliation nationale et de redressement économique, a été vivement souhaité et réclamé par nombre d’observateurs.

La nomination d’un nouveau P.M en la personne de M.SOUARE, est arrivée comme une bouffée d’air, sans pour autant créer un sentiment de quiétude et de réconfort moral, car les préalables fondamentaux  nécessaires à une réorientation politique saine, n’ont pas été établis de manière satisfaisante, en ce sens que les mécanismes de base du fonctionnement de l’administration publique, trouvent leur fondement dans des pratiques jugées contraires à la morale et à l’éthique, parce que faisant fi, des principes universels relatifs à la bonne gouvernance.

Le principal point de friction aujourd’hui, est que la vision politique de nos dirigeants, se caractérise par un laxisme décadent et anti-progressiste, en témoignent le laisser-aller et le laisser-faire, dans le cercle présidentiel et les prises de position ou plus exactement les non prises de position de M.SOUARE, par rapport aux dossiers brûlants hérités de l’équipe Kouyaté, dont le mode d’administration, s’il a connu des oppositions de principe, en ce qui concerne sa gestion politique et économique, a cependant eu le mérite de soulever certains sujets de préoccupation, dont on aurait espéré un aboutissement rapide, par un traitement adéquat et efficace de la part de  l’actuel gouvernement.

 La cause de cette inaction est-elle due à un manque de courage et de volonté politique, ou c’est tout simplement la manifestation des déséquilibres institutionnels, créés par les flous juridiques et les nombreuses luttes d’influences qui minent la vie politique guinéenne ?

Le constat qui s’impose, c’est qu’on a le sentiment d’avoir atteint le summum de l’incrédulité, malgré les apparences et les discours de bonnes intentions, dont les effets d’annonce ont pour impact négatif, d’inhiber les velléités revendicatives de la population, engloutie dans un obscurantisme traumatisant, d’une part, à cause de l’intimidation entretenue par les exactions des forces de l’ordre et d’autre part, par  la manipulation des esprits, orchestrée par le manque de probité morale de certains intellectuels, dont le rôle aurait pourtant dû consisté à éveiller les consciences endormies, plutôt qu’à créer la confusion, par leurs discours de haine et de division.

A propos, il faudrait reconnaître, de façon implicite, la partition non négligeable, jouée par tous ces soi-disant intellos qui, se sont vus associés à la gestion de la chose publique, au fur et à mesure du retrait des militaires de la scène politique, en simple considération du fait qu’ils apparaissaient aux yeux de tous, comme les mieux à même d’initier et de conduire des politiques de développement économique et social, en raison de leurs capacités intellectuelles et de leur maîtrise technique des dossiers. Et, contrairement aux attentes, ils ont profité de la naïveté du vieux général, qui leur a accordé toute sa confiance et ils se sont rendus coupables de trahison à l’encontre du peuple, qui plaçait en eux ses espoirs de lendemains meilleurs.

L’important aujourd’hui dans le débat citoyen, c’est de stigmatiser les comportements récurrents malsains, avec la délicatesse de ne pas citer nommément les individus, car les accusations qui se nourrissent des rumeurs sans preuves matérielles, peuvent valoir à leurs auteurs des poursuites judiciaires, pour diffamation.

La liberté d’expression garantie par la loi fondamentale guinéenne, nous donne certes le droit de critiquer, mais quand il ne consiste qu’en des attaques frontales de personnes, le droit de réponse y trouve aussi sa légitimité, nous plongeant ainsi dans un engrenage du genre, << si tu me piques, je réplique et te pique comme un tic ; je t’attaque, tu contre-attaques, je te matraque… (Bill de Sam)>>

 La justice pour qu’elle soit crédible, se doit de s’exercer dans sa plénitude, avec la reconnaissance des droits, aussi bien pour les victimes, que pour les bourreaux.

A cet effet, pas besoin d’être un éminent juriste pour comprendre, en considération du fait que nul n’est censé ignorer la loi, que jusqu’à preuve du contraire, la présomption d’innocence est valable pour tous. Seule la justice a compétence, de se prononcer en toute impartialité, sur la culpabilité d’un individu, après bien évidemment, arrestation exempte de tout arbitraire, instruction du dossier d’accusation, mis en examen, jugement et délibération, dans la transparence de la légalité constitutionnelle, car il est de nature dans le genre humain, de se rebiffer systématiquement, de par son instinct basique de défense de ses intérêts, contre tout ce qu’il estime, susceptible de causer sa perte, fût-elle une vérité ou une forfaiture dont il reconnaît de façon consciente, être coupable et c’est là l’importance du caractère coercitif de la juridiction dans une société, qui ne doit cependant s’exercer que dans le cadre d’une indépendance totale, pour ce qui est des prises de décisions, sans interférence aucune entre les différents domaines de compétences,  définis par Montesquieu dans l’esprit des lois.

En guinée, des victimes innocents, il y’en a à ce jour, nombre qui ont payé de leur sang et de leur chaire,  simplement à cause de leur opposition à de modes de gouvernance, qu’ils jugeaient contraires aux mœurs et malgré les cris de cœur pour que justice leur soit rendue, les équipes gouvernementales successives, font la sourde oreille, comme pour confirmer les suspicions qui font état de leur implication et de leur responsabilité, dans les massacres perpétrés. Mais si justice divine y’en a,  tôt ou tard, ils se retrouveront coincés, dans une sorte de cul de sac, dans leur fuite en avant qu’ils supposent éternelle et ce jour, ils rendront compte de leurs actes, avec le châtiment que méritent les traîtres de la nation. En tous les cas, reconnaissons la difficulté à se situer par rapport au mal-être en guinée, qui si ses causes sont multiples et variées, le fait que la situation perdure, relève de la responsabilité collective de tous ceux qui, à un moment ou à un autre, ont eu l’opportunité d’exercer une parcelle d’autorité, car ils se sont tous inscrits dans une logique de conformisme latent, obéissant aux dictas de l’establishment, en profitant allègrement des failles du système, avec une voracité déconcertante.

L’incarnation du système actuel par le général Président, le rend coupable à maints égards, car il s’est autoproclamé chef suprême, omnipotent de tous les guinéens, avec un pouvoir décisionnel sans partage, qui s’exerce au gré de ses humeurs et de ses influences du moment et son entêtement à se maintenir au pouvoir, malgré son incapacité physique et pire mentale, constitue une circonstance aggravante des jugements portés à son encontre. .

Aujourd’hui, Les yeux sont rivés sur l’organisation  des élections législatives et pendant ce temps, les acteurs politiques se démènent comme de beaux diables, dans l’espoir de se tailler une place de choix dans la future assemblée nationale.

Cependant, entre les alliances de circonstance et les tentatives de déstabilisation, le guinéen lambda n’a que l’embarras du choix, pour ce qui est de son adhésion à la cause des partis politiques, du fait que les leaders ne font que se remarquer par la maladresse dont ils font preuve, à travers leurs discours, dont la quintessence saute aux yeux, comme principalement axé, sur la seule conquête  du pouvoir, en justifiant les moyens peu orthodoxes employés, pour une fin qui n’en est rien en soi. L’administration publique, brille quant à elle, par le manque d’autorité de l’Etat, qui relègue au second plan, les attentes de la population, les dossiers en suspens tels, la suite donnée aux  audits des départements ministériels et les travaux de la commission nationale d’enquête sur les massacres, en sont une belle  illustration.

Le dernier exemple éloquent de l’impunité dans notre pays, est le scandale des fraudes au BEPC, qui ne nous fait pas du tout honneur et contribue davantage à décrédibiliser le système éducatif guinéen, dont la plupart des diplômes ne sont pas homologués par le CAMES (organisme africain de reconnaissance des diplômes des pays membres, dont la guinée). Pareille débâcle aurait entraîné une démission de facto de tous les responsables qui ont à charge, l’organisation des examens.

L’une des intrigues en ce moment, est aussi le fait que les différents clans constitués, en prévision de l’après-Conté, se livrent à une bataille féroce, qui fait le bonheur des charlatans qui trouvent là, une manière aisée de gagner leur pitance. La science occulte du maraboutage est une pratique ancrée dans les mœurs en Afrique et à ce titre, il n’est pas surprenant de voir les gens s’y adonner, mais il y’a une nuance de taille entre ceux qui en font usage pour se protéger des malheurs et ceux qui y trouvent le moyen de ne faire que du mal à leurs prochains et le plus souvent, ce sont ceux-là même qui triment dans les malversations et les coups fourrés. Que ces derniers comprennent une logique implacable dans cette vie, à savoir que du moment où il y’a adéquation entre ce que l’on pense et ce que l’on ressent (esprit et cœur), le mal accouche du mal et le bien enfante le bien, car ce sont les choses de même nature qui s’engendrent.

Par ailleurs, l’amélioration positive des indicateurs économiques, qui se caractérise par le rétablissement des relations de coopération avec les institutions de Bretton Woods, peut être aperçue comme favorable à la croissance, mais les fruits de cette croissance, sont pour une grande part, alloués aux dépenses extravagantes de fonctionnement de l’Etat, qui a du mal à faire des arbitrages budgétaires efficaces, à même de contribuer à court terme, à l’amélioration significative des conditions de vie de la population, par la satisfaction des besoins primaires en eau, électricité et nourriture.

Le secteur industriel souffre, non seulement de l’absence de cadre institutionnel garantissant les investissements privés, mais aussi de mesures incitatives, par des aménagements fiscaux favorables aux apports de nouveaux capitaux et du manque criard d’électricité, qui reste en matière d’industrialisation, le pendant de ce qu’est le sang pour le corps humain.

Le déficit de la balance des paiements et celle commerciale, entretien l’inflation et demeure une des causes principales de spéculation sur le marché des denrées alimentaires de base. Malgré l’immensité des terres cultivables, la politique agricole peine à se départir des méthodes de gestion extensive des sols à faible rendement, pour cause de manque de moyens financiers, matériels et de maîtrise technique, les mêmes contraintes s’appliquant au secteur de l’élevage, car la libéralisation des initiatives privées dans ces domaines, ne bénéficie que de peu ou pas d’accompagnements, à la hauteur des enjeux.

Ce succinct passage en revue de la situation, montre que l’on est loin de sortir de l’auberge, car les manquements se situent à tous les niveaux et les mauvaises habitudes ayant la vie coriace, l’espérance de la rédemption, dépendra de notre volonté de surpassement, pour une convergence d’idées nouvelles, qui prennent en compte avant tout, le seul et unique intérêt du peuple de guinée, dans un ensemble viable et homogénéisé.

 

BAYO Abidine

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