Présidentielle: Et si s'était une révolution politique ?

Trois faits inédits - non ingérence du gouvernement dans le processus électoral, examen de santé des candidats, implication manifeste de l'Etat major des forces Armées dans la sécurisation du scrutin - ont aujourd'hui quelque chose de fascinant qui font du reste l'objet de discussions parfois passionnées dans les bureaux, auvents, bars cafés et autres milieux politiques.

Plus d'un Guinéen épris de démocratie rêve d'un pays normal. Et ce que nous voyons déjà chez nous est bien énorme : la Guinée bientôt dans une révolution politique sans précédent (?). Il se passe quelque chose en effet dans ce riche pays de l'Ouest africain. Ce pays obscur au contraste saisissant qui a tout mais qui manque tout. Ce pays où la bonne gouvernance est interminablement restée un voeu pieux, tandis que la course à l'argent, devient le nouveau dieu, a sérieusement encouragé la corruption rampante et la délinquance économique à haute échelle. Ce pays des honteuses mascarades électorales. Mais aussi ce pays qui continue de se bomber le torse et faire valoir sa ‘'pauvreté dans la dignité''. Enfin ce pays de la gabegie rampante, de l'impunité, où les droits de l'homme sont peu ou pas du tout respectés.
Et pourtant, malgré un climat politique tendu, un environnement militaire marqué nous dit-on par des bruits de bottes ou tentatives de coups d'État, la Guinée semble réussir à échapper à la guerre civile et à maintenir son unité nationale. C'est peut-être aujourd'hui sa plus grande réussite qu'il faut absolument préserver avant, pendant et après les joutes électorales. Oui, c'est cette Guinée là qui ambitionne enfin à ce jour de marcher au rythme de la démocratie, à travers des élections transparentes, justes et équitables. Les autorités civiles et militaires de la place s'y emploient ardemment et elles y croient. La Guinée agitée par des mouvements perpétuels, est donc en passe de rejoindre le monde civilisé. Cette société composite, plus marquée par des mépris, préjugés et autres bigoteries héritées des deux régimes défunts, est en train de produire certainement un bel exemple de démocratie permettant au Guinéen d'être moins complexé vis-à-vis des diatribes politiques de tout acabit.

Exceptions pour une nouvelle ère...


Les Guinéens rêvent d'un nouveau président démocratiquement issu des urnes, faisant ainsi exception pour une nouvelle ère. Un homme bien différent des deux anciens présidents, manifestement despotes. La volonté politique est là. Et elle est boostée récemment par des actes novateurs du Colonel Nouhou Thiam, Chef d'Etat major général des Armées lequel a mis en garde toute tentative encline à compromettre le processus électoral: « Je vous rassure que l'armée et les forces de défense seront neutres mais en cas de dérapage, je vais mater. » Avant d'ajouter que l'Armée est impartial et jouera le rôle qui est le sien, c'est-à-dire la défense de l'intégrité territoriale.
Pour ainsi ajouter l'utile à l'agréable, il a été annoncé par décret, le déploiement de quelque 16 mille hommes pour sécuriser le scrutin. Le changement de mentalité des hommes en informe passe aussi par là, pourrait-on dire. En effet, l'armée guinéenne a besoin de très profondes réformes pour devenir professionnelle et républicaine, donc aucune immixtion dans le jeu politique. Le simple fait de l'associer d'une façon directe au processus du scrutin, le président par intérim signe une autre nouveauté. Ce, au moment où la mort de Lansana Conté a failli remettre en cause entre autres l'échéance électorale de la présidentielle 2010, préalablement fixée.
Deuxième fait inédit, l'examen médical des candidats. Si cela avait été fait du vivant de Lansana Conté, alors, tout s'était passé loin des cameras et... d'une Cour constitutionnelle forte. Certes, de nombreuses questions subsistent encore à propos du collège mis en place récemment: comment seront rendus les résultats, quels sont les critères de choix des médecins, etc. De toute évidence, comme le stipule la Constitution relookée par le CNT tous candidats doivent jouir d'un état de santé certifié par un collège médical assermenté désigné par la Cour constitutionnelle. Ce qui est en train d'être fait actuellement. Rendre publique les résultats ? Cela relèverait de la compétence de la Cour suprême et sauf peut être par jurisprudence, on ne violera pas le secret médical en mettant sur la place publique le carnet de santé de ceux qui veulent nous gouverner. Reste l'on retiendra que c'est vraiment un fait nouveau.


Tenir compte des complaintes

Pour réussir le pari de la présidentielle donc élargir les faits inédits garantissant ces joutes historiques, il serait aussi judicieux de se pencher sur le supposé cafouillage de la Ceni dont fait adroitement allusion le GIC et certains leaders politiques. Il suffit entre autres de tout verrouiller. Pour y arriver, la gestion des résultats du vote dont le pays aurait déjà reçu des offres doit constituer un sacerdoce. Des offres comme celle faite par l'Afrique du Sud devrait permettre à la chaîne électorale d'utiliser des logiciels appropriés comme ce fut le cas dans nombreux pays sud africains alors en crise.

Selon le site Guineepress, « Le marché de cette offre a été confié à la société sud-africaine Waymark Infotech spécialisée dans la construction de logiciels de gestion des élections et spécialement en Afrique. Elle a organisé des élections en Afrique du Sud, en Tanzanie, au Kenya, au Zimbabwe, au Rwanda... Nous savons que toutes ces élections ont été organisées dans des pays en crises et ou en guerre, cependant la gestion des résultats des scrutins dans tous ces pays n'a souffert d'aucune contestation en raison de la fiabilité du système. » Ce qu'il faudra encore ajouter pour débarrasser du scrutin de tous risques de fraudes, c'est de démilitariser les structures décentralisées : Préfectures et Gouvernorats. Et en même temps destituer tous les présidents de CRD dont le passé récent avec Dadis et Conté a eu un parfum de ‘'complot'' dont eux seuls détenaient le secret. Certains visiblement très offusqués, iront certainement jusqu'à la désintégration totale de la Ceni dont la composition fait encore grincer les dents. Mais ceci est une autre histoire.

Il revient pour l'heure aux 4 224 272 électeurs de bien faire leur choix selon la feuille de route des leaders et non selon l'appartenance ethnique ou régionaliste. Après tout, quand on a toujours perdu, au moins ne perdons pas les leçons. Que le sérieux et meilleur candidat soit bien élu au soir même du scrutin. Toute une révolution en perspective, pourrait-on déjà rêver!

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Commentaires

  • Mohamed Fofana
    • 1. Mohamed Fofana Le 23/05/2010
    Monsieur Sow,
    Votre analyse est on ne peut objective, débarrassée de toute prise de position irrationnelle.
    Vous faites la fierté du net car ce bel instrument tend plus à nous diviser qu’à nous rassembler. Je partage à maints égards vos réflexions tant elles mettent l’accent sur ce qui est bien, ce qui est réalisé et non tomber dans la spirale perpétuelle d’évocation du mal. C’est vrai mon frère, la Guinée a énormément gagné pendant ces derniers mois, compte tenu du péril imminent qui la guettait, qui nous guettait tous. Ne dit-on pas souvent que seul l’insensé, l’ignorant peut danser quand le feu consume les richesses de son village. Permettez-moi de citer ces beaux vers d’un poète du lointain passé :
    « Honte a qui peut chanter
    Pendant que Rome brule
    S’il n’a lame de la Lyre
    Et le cœur de Néron. »
    Loin de m’écarter du sujet, je veux simplement souligner la responsabilité qui nous incombent a nous tous de sauver la nation en détresse. Vous comprendrez alors aisément l’importance de vos écrits qui sont toujours restés au milieu.
    Je termine par exhorter mes concitoyens de voire en ces élections un événement passager par rapport à la nation, à ce qui nous est de commun : La Guinée
    Alpha Condé, Saidou Dalein, Sydia Touré, Ousmane Bah, Kouyaté, Kassory… tous passeront comme Samory, Alpha Yaya, Behanzin, Dinah Salifou, Sékou Touré, Telli Diallo, Kaman Diaby, Kara de Soufiana, comme Bah Mamadou et Siradio Diallo, comme vous et moi, mais la GUINEE restera

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