Quand le refus de Sidya Touré de cautionner l'ethnocentrisme est récompensé par l'ingratitude de certains cadres et militants de l'UFDG

Après la proclamation des résultats définitifs du 1er tour de la présidentielle, des négociations ont été entreprises par les deux partis en lisse pour le 2nd tour en vu de s’attirer les grâces de Sidya Touré.

Nonobstant toutes les considérations subjectives et ethniques, Sidya Touré, qui a toujours refusé l’ethnocentrisme et prôné l’unité de tous les fils du pays, a choisi de s’allier à son ancien Ministre, Cellou Dalein Diallo, dans le but de créer une équipe capable d’unir ses forces pour sortir la Guinée de la misère.

Mais fort malheureusement, depuis la proclamation des résultats définitifs du 2ème tour qui ont consacré sa défaite, Cellou Dalein Diallo et certains cadres de son parti tentent d’extérioriser ce qu’ils pensent réellement et se livrent à des coups de griffes voilés à travers les organes de presse nationaux et internationaux, confirmant ainsi l’ingratitude prophétisée avant la signature de l’alliance.

En effet, dans une interview accordée à ‘’Jeune Afrique’’ et publiée dans son n°2606 du 19 au 25 décembre 2010 , Cellou Dalein Diallo s’est exprimé en ces termes : « Nous n’avons pas obtenu ce que nous espérions notamment des militants de l’UFR et de la NGR. Sidya Touré et Abé Sylla ne se sont pas suffisamment mouillés. Ils ont commis l’erreur de croire que les électeurs suivraient aveuglement leur consigne de vote. Ils auraient dû aller vers eux et expliquer pourquoi ils m’avaient choisi ».

Dans la même période, un proche de l’UFDG, analyste financier converti en politologue mais dont les analyses politiques sont des plus médiocres, en l’occurrence Mamadou Barry, écrivait dans l’hebdomadaire guinéen L’observateur n°522 du 27 décembre 2010 :

« Il avait été dit et écrit que n’est pas faiseur de roi qui le veut. Pour cela, il faudrait que le leader en question soit crédité d’un minimum de confiance de la part de sa base. Henry Konan Bédié nous l’a montré à travers ses militants et sympathisants du PDCI lors du second tour de la présidentielle en Côte d’ivoire.

Il a même été dit que l’UFR qui est venue à l’Alliance Cellou Dalein Président n’est qu’une coquille vide.

La sanction est donc tombée tout naturellement au niveau de la Basse Guinée lors du scrutin du second tour, non pas sur Cellou Dalein, mais bel et bien sur Sidya Touré. En effet, si Cellou Dalein a perdu à cause du non report des voix des électeurs de ses alliés, Sidya lui, est politiquement mort.

La logique de cette mort politique est la suivante. Si Alpha Condé a réussi à aller chercher l’électorat naturel de Sidya pendant que ce dernier est à l’UFDG sans avoir besoin de lui, Cellou Dalein peut parfaitement, dans le cadre des prochaines législatives en faire de même sans Sidya.

La sortie du leader de l’UFR le jour de l’investiture du nouveau Président de la République…montre bien que Sidya Touré a désormais changé de camp. »

L’assertion de Cellou Dalein Diallo appelle quelques remarques.

Au prime abord, faut-il rappeler au leader de l’UFDG que son passé politico-administratif et la campagne agressive voire arrogante de ses militants et de sa communauté au 1er tour lui ont valu l’isolement dans lequel il s’est retrouvé dans l’entre-deux tour. Si Sidya Touré, qui a emmené avec lui Abe Sylla, n’était pas venu à l’alliance, la compétition électorale du second tour aurait pris fin depuis longtemps parce que Alpha Condé aurait agenouillé Cellou Dalein Diallo sans grands efforts.

Dans ses propos, Cellou Dalein Diallo feint d’oublier le parti pris presqu’officiel des autorités de la transition qui ne voulaient pas de lui à la tête du pays. Le leader de l’UFDG a très vite oublié que face à la machine qui avait été déployée pour le broyer, les cadres de l’UFR et de la NGR ont été d’un grand appui dans le Directoire de campagne unifié. Tout le monde le sait, le rôle qu’ils ont joué sur le terrain et leur contribution lors des différentes conférences de presse et des émissions radiophoniques.

Dans le fond, Cellou Dalein Diallo manque de cohésion dans son raisonnement :

- Soit il y a eu fraude et c’est lui le vainqueur : alors Sidya Touré, Abé Sylla et les autres lui ont apporté des voix parce que sa communauté à elle seule ne pouvait le faire gagner ;

- Soit Sidya Touré, Abé Sylla et les autres ne lui ont rien apporté : alors il ne peut pas contester la victoire du Pr Alpha Condé puisque les guinéens ne lui ont pas accordé leurs suffrages.

Avant de faire cette déclaration, Cellou Dalein Diallo aurait dû se poser la question de savoir pourquoi l’on s’est lancé dans un lynchage médiatique contre la personne de Sidya Touré dès la signature de l’alliance. La réponse, tout le monde la connait et le Pr Alpha Condé en a fait le moteur de sa campagne. Et les arguments à cette réponse ont été fournis par Cellou Dalein Diallo et ses militants à travers la campagne arrogante au 1er tour, le sectarisme dans les offres d’emploi dans les entreprises de la place, la mainmise sur le commerce, la flambée des prix, les journées ville-morte qui affamaient les populations, etc.

Aujourd’hui, nombreux sont les observateurs qui pensent que Cellou Dalein Diallo et son entourage direct ont été les artisans de leur propre défaite. Pour eux, les raisons profondes de la défaite doivent être recherchées dans la personnalité du candidat de l’alliance, le comportement de sa communauté et le bicéphalisme qui tenaille l’UFDG dans son fonctionnement. S’ils reconnaissent que Cellou Dalein Diallo est un homme pondéré, ils insistent sur le fait qu’il n’a pas été à la hauteur de la campagne et n’a pas su aller au-delà de son électorat naturel. Il n’a pas su se donner une véritable nationale.

Relativement au propos de Mamadou Barry, il faudrait préciser que contrairement à Allasane Ouattara, allié de Henry Konan Bédié (qui est allé se faire baptiser en pays baoulé, qui faisait jouer toutes ses musiques de campagne pour le 2ème tour en langue baoulé), Cellou Dalein Diallo a continué à s’afficher avec son bonnet peulh. Né en Guinée où il a toujours vécu, Cellou n’a pas pu prononcer un seul mot en langue soussou durant toute la campagne. Pendant que la campagne de Alpha Condé était animée avec des sonorités en langues soussou, c’est la musique pular qui était à l’honneur dans tous les meetings de Cellou Dalein Diallo. Alors que les électeurs dont il avait besoin étaient des soussous de la Basse-côte.

Les accords conclus à cette occasion comportant une partie relative aux élections une partie relative aux élections législatives au cours desquelles, les alliés se sont engagés à se soutenir mutuellement en fonction des rapports de force dans les différentes circonscriptions.

A cet égard, la dénomination de l’Alliance est désormais inappropriée.

De sources proches de l’UFDG, dans le domaine de la communication, pendant que l’Alliance arc-en-ciel pratiquait le porte-à-porte et occupait tous les panneaux publicitaires, l’UFDG n’a pu en faire de même soit parce les cadres de l’UFDG retenaient les fonds qui devaient être alloués aux partis alliés pour les fragiliser dans l’alliance, soit les fonds étaient purement et simplement détournés par les cadres de l’UFDG. Les cadres de l’UFR s’en sont fréquemment offusqués. Si bien que pour expliquer les raisons de son choix, l’UFR a dû débourser plus de fonds qu’elle n’en recevait de l’UFDG, comme si c’est elle qui présentait un candidat.

A cela s’ajoute le caractère ethnique trop marqué du parti, lui-même fragilisé par un bicéphalisme et les multiples centres de décisions qui ont empêché une bonne coordination de la campagne électorale.

C’est le moment de préciser que le même Mamadou Barry avait récemment écrit un article intitulé « L’alliance des bâtisseurs » et dans lequel il faisait les éloges de Sidya Touré en prédisant un avenir radieux pour celui-ci aux côtés de Cellou Dalein Diallo. En fait, ceux-là mêmes qui avaient insulté Sidya Touré à l’occasion des manifestations consécutives aux résultats du 1er tour, avant de l’aduler lorsqu’il a fait alliance avec leur « parent » Cellou Dalein Diallo, reviennent aujourd’hui à la charge pour la défense d’intérêts non avoués.

Lorsque celui-ci affirme que Sidya est politiquement mort, il montre encore une fois de plus la faiblesse de son niveau d’analyse politique puisqu’après une élection, tout homme politique a le devoir de tirer des leçons. Le capital confiance dont dispose Sidya Touré, aucun autre leader politique guinéen ne l’a parce que lui on l’a vu à l’œuvre. Contrairement à beaucoup d’autres, ceux qui lui ont accordé leurs suffrages au 1er tour ne l’on pas fait pour des raisons ethniques. A l’issue de ces élections, les militants de l’UFR ont montré à Sidya Touré qu’ils n’avaient pas totalement partagé le choix des structures centrales. En conséquence, en homme politique à l’écoute de la base, il se doit de corriger cet état de fait.

Les électeurs du 1er tour n’ont pas voté au 2ème tour parce qu’ils n’aimaient plus Sidya Touré ou n’avaient plus confiance en lui, mais parce qu’ils ne portaient pas à cœur son choix de s’allier à Cellou Dalein Diallo. Et quand Mamadou Barry dit plus loin que l’UFDG pourrait à elle seule accaparer l’électorat de la Basse-côte, c’est qu’il ne tire aucun enseignement des résultats du 2ème tour du scrutin présidentiel.

Relativement à sa présence à la cérémonie d’investiture du Pr Alpha Condé, il faudrait que les uns et les autres comprennent que l’alliance entre l’UFDG, UFR et la NGR est une alliance électorale conclue après le 1er tour du scrutin. Il ne s’est jamais agi d’une alliance politique du genre du RHDP en Côte d’Ivoire dont les membres ont travaillé ensemble depuis cinq ans à la préparation de l’élection présidentielle. L’alliance Cellou Dalein Président est un mouvement circonstanciel dont la durée de vie est liée au scrutin qui a déterminé sa création.

Cellou Dalein Diallo partage ce point de vue puisque, répondant dans son interview précitée à la question de savoir si Sidya Touré restera un partenaire pour les combats politiques à venir, il a répondu « oui, je le pense. Mais pour l’instant, nous n’avons pas défini les contours de ce partenariat ».

Pour terminer, il faudrait que Cellou Dalein Diallo et les cadres qui s’agitent autour de lui ne se trompent pas : ils constitueraient une opposition trop fragile et étiquetée ethnique en se bornant à vouloir ternir l’image de Sidya Touré pour l’affaiblir. Ce dernier en a trop pris sur lui en acceptant de s’allier malgré tout à Cellou Dalein Diallo. Aux yeux de tous les observateurs, l’UFR a été d’un grand appui à l’UFDG qui aurait roulé seule ou presque pour le 2ème tour, confirmant ainsi le qualificatif de parti ethnique qu’on lui colle. Il est dès lors inadmissible que Sidya Touré ait pour récompense l’ingratitude.

Au lieu de s’attaquer à l’UFR, l’UFDG devrait procéder à une sérieuse introspection qui l’emmènerait à se poser la question de savoir pourquoi les autres communautés guinéennes ont systématiquement refusé de voter pour son candidat. C’est là la vraie question puisque c’est la réponse à celle-ci qui a empêché le report des voix des militants de l’UFR et de la NGR.

Les résultats de cette introspection lui permettraient sûrement de mettre fin à son bicéphalisme et ses conséquences (comme celle du protocole d’accord du 06 novembre 2010 signé par Bah Oury) et réorganiser le parti en pensant à l’ouvrir sincèrement à toutes les communautés du pays.

Mohamed Lamine Kourouma

Matoto-Conakry

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