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Cellou Dalein Diallo : «Alpha Condé et un stalinien»

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Entre le président Alpha Condé et l’opposant Cellou Dalein Diallo, l’adversité est si tenace que les deux hommes ne tarissent pas de propos acerbes pour se régler les comptes dès que l’occasion se présente. La preuve nous a été administrée lors de notre séjour à Conakry, dans le cadre du match des Etalons juniors contre le Sily National, où nous avons, en marge, rencontré le chef de file de l’opposition, le 30 juillet 2012. Il qualifie  le chef de l’Etat de stalinien, venu au pouvoir pour tribaliser le débat politique et diviser les Guinéens. Mais, foi de l’ancien Premier ministre, la paix dans le pays est tributaire d’élections législatives apaisées.

Comment se portent Cellou Dalein Diallo et  l’opposition dont  il est le chef de file ?

• L’opposition se porte bien,  moi aussi, malgré les difficultés créées par le pouvoir pour nous empêcher d’aller à des élections législatives transparentes.

 

En attendant d’aborder la question des législatives, dites-nous, avec le recul, qu’est-ce qui vous a fait perdre la présidentielle alors que vous aviez une très grande avance sur votre challenger ?

• Je n’ai jamais cessé de dénoncer la complicité des autorités de la transition qui ont voulu à tout prix passer le témoin  à Alpha Condé. Et pour ça, elles m’ont imposé quatre mois et demi entre le premier et le second tour, le temps pour elles d’organiser la fraude massive à laquelle elles se sont livrées avec la complicité des fonctionnaires de l’administration décentralisée. Je pense que j’ai fait une excellente campagne. J’ai mobilisé les Guinéens sur la base de valeurs auxquelles ils sont très attachés : l’unité de la nation, la liberté et la démocratie. Ils ont cru en moi. Ils m’ont voté massivement. Malheureusement, la complicité des uns et des autres a fait que je n’ai pas gagné l’élection. J’ai accepté cet état de fait pour éviter au pays de sombrer dans des violences qui auraient pu déboucher sur une guerre civile.  Je ne regrette pas mon acte. C’est pourquoi, cette fois-ci, je tiens à ce que les conditions d’un scrutin équitable soient réunies avant d’aller aux  législatives.

 

18 mois après l’installation du Pr Alpha Condé, quelle appréciation faites-vous de  sa gouvernance ?

• Nous sommes très déçu de sa gouvernance. Nous avions pensé qu’après cette présidentielle, le combat pour la liberté, l’installation de l’Etat de droit, le respect des règles démocratiques seraient une réalité. Nous avons cru qu’ensemble nous allions plutôt conjuguer nos efforts pour promouvoir une véritable réconciliation entre les Guinéens et engager le pays sur la voie d’un développement au profit de tous. Malheureusement, depuis que le Pr Alpha Condé est arrivé au pouvoir, il a multiplié les actes qui relèvent de la mauvaise gouvernance. Il a violé la Constitution et plusieurs lois de la République. Il a montré qu’il pouvait exercer un pouvoir autoritaire qui ne tient pas compte des règles et des principes démocratiques.

Il ne veut respecter ni les libertés fondamentales, ni les droits de l’homme. En tant que président de l’UFPG, mes manifestations pacifiques ont été réprimées  dans le sang. J’ai enterré déjà sept de mes militants depuis qu’il est aux affaires. Ils ont été assassinés lors de manifestations pacifiques, à l’occasion des réceptions que mes militants ont voulu organiser pour moi, et lors de celles que l’opposition a organisées. Jamais le Président ne s’est ému et n’a ouvert aucune  enquête pour savoir comment ces gens ont été tués. Jusqu’à présent, la justice n’a pas été saisie. Même lorsque les parents des victimes ont déposé des plaintes, il a refusé que la justice les reçoive.

Dès son installation, nous avons voulu aller aux élections législatives, il a systématiquement refusé d’ouvrir le dialogue avec l’opposition. Il a renvoyé la société SAGEM qui devait procéder à la révision des listes électorales. Il a choisi, avec son fils et sans appel d’offres ni cahier des charges, une société sud-africaine. Il a importé le matériel et a mis de côté celui utilisé par SAGEM  qui appartient pourtant à la Guinée. Ce matériel avait été testé dans tous les laboratoires  et avait été jugé performant. Alpha Condé nous impose aujourd’hui une société avec du matériel peu sécurisé juste pour lui permettre de tripatouiller la liste électorale, parce que c’est devenu un enjeu majeur des élections en Afrique. Donc nous sommes déçus par la manière dont il gère le pays, par cette stigmatisation d’ethnie à laquelle il se livre quotidiennement par l’exclusion, l’arbitraire et les injustices qui ont cours dans ce pays.

 

Vous avez été Premier ministre dans ce pays et les maux que vous dénoncez aujourd’hui avaient cours aussi  sous votre gouvernance…

• Peut-être ! Mais je pense  que quelqu’un comme Alpha Condé, qui revendique 50 ans de combat pour la démocratie, les droits de l’homme et la liberté, ne doit pas tomber dans les mêmes travers. On ne va pas dire que, parce que  sous Conté ou Sékou Touré les droits de l’homme n’étaient pas respectés et que les libertés n’étaient pas reconnues, avec Alpha Condé, qui se dit professeur de droit et qui  revendique 50 ans de combat pour la démocratie, ce n’est pas grave si la même chose se répète. L’Afrique et le monde sont en train de changer, il  faut que la Guinée aussi le fasse. Vous avez vu les printemps arabes. Tous les peuples aujourd’hui revendiquent le respect de leurs droits et de leurs libertés. J’ai été Premier ministre, j’assume mon bilan et je suis très fier de ce que j’ai fait pour mon pays à tous les niveaux de responsabilité que j’ai occupés.

En 2007, il y a eu 185 jeunes qui ont été assassinés. Ils ne luttaient pas pour qu’Alpha ou Cellou soit au pouvoir, mais pour que la Guinée soit un pays démocratique. Un pays où les droits de l’homme et les libertés sont respectés. Aujourd’hui, ces gens-là sont morts pour l’avènement d’une société démocratique. Le 28 septembre 2009, on a eu 155 jeunes qui ont été assassinés et près d’une centaine de femmes violées. Tout ça, ce n’était pas pour que X ou Y soit au pouvoir, mais pour qu’on vive dans un Etat de droit où la démocratie est une réalité, où les droits humains sont protégés.

Mais aujourd’hui, on est loin de cela. C’est ça la grande déception. On ne peut pas dire que ces pratiques, qui ont eu lieu il y a 20 ans, il faut les continuer. On  avait besoin de changement et le président Condé a fait sa campagne en annonçant le changement ; mais il n’y a vraiment pas eu  de déclic. Il y a la mauvaise gouvernance. Il signe des contrats  dans une opacité totale. Vous avez sans doute entendu parler du contrat de 25 millions de dollars passé avec une société sud-africaine pour prendre le contrôle de certaines entreprises minières. Tout cela, il n’y a pas de transparence. Il n’y a pas la bonne gouvernance.

 Le chef de l’Etat soutient qu’il vous a tendu la main pour que vous gouverniez ensemble  afin de relever les nombreux défis de la Guinée…

• Alpha Condé raconte beaucoup de choses, mais il ne m’a jamais fait quelque proposition de quelque nature que ce soit. Maintenant, lorsque ça l’arrange, il peut dire qu’il m’a proposé ceci et cela. J’ai dit à un certain moment donné que je ne fais pas la politique pour entrer dans un gouvernement. Compte tenu des violations répétées de la Constitution, des droits humains auxquels il s’est livré, j’ai dit à un moment donné que si je dois entrer dans un gouvernement, il faut que ça soit sur la base d’un programme pour instaurer l’Etat de droit, la démocratie. Je ne peux pas participer à ces violations de la Constitution, à ces restrictions des libertés des Guinéens auxquelles il se livre quotidiennement.

 

Vous aimez qualifier le président Condé  de dictateur. Le mot n’est-il  pas trop fort ?

• C’est un  stalinien. Il aime exercer le pouvoir lui seul, dans la plus grande opacité. Ce n’est pas trop fort par rapport à ce qu’on attendait du professeur de droit, du leader historique qui revendique 50 ans de combat pour la démocratie et la liberté.

 

Finalement à quand les législatives ?

• La date est certes importante, on a besoin d’aller  aux élections législatives, mais il faut qu’on se mette d’accord avec quelle CENI (ndlr : Commission électorale nationale indépendante), avec  quel fichier, avec quel opérateur privé qui va assister la CENI pour la révision des listes électorales. Actuellement, Alpha Condé a mis en place toute une administration électorale pour lui faire gagner les élections. Il a fait recomposer les démembrements de la CENI. Il a donné une place prépondérante aux gens du RPG, son parti. Il a dissous tous les conseillers communaux qui ne lui étaient pas favorables.

Il a mis des délégations spéciales comprenant exclusivement des gens du RPG. Il a nommé des préfets, des sous-préfets et des gouverneurs auxquels il a donné mandat d’installer les bureaux de son parti partout à travers le pays et de participer à l’animation de sa formation politique. C’est ça la réalité. Il a fait venir de l’Afrique du Sud la société Weymark sans aucune transparence, je vous dis aucune. Aujourd’hui, la Commission électoral lui est soumise.

La parité qui était le fondement de sa  neutralité est perdue parce qu’il a mis tout le monde de son côté. Le président de l’institution, qui méprise l’opposition, qui l’insulte et qui a déjà montré qu’il est incompétent et de mauvaise foi, parce qu’il a déjà fixé six dates, et qui s’est livré à toutes sortes d’anomalies, ne veut pas qu’on change cette structure. Donc il est prêt à organiser un hold-up électoral, mais nous ne l’accompagnerons pas dans cette fraude en perspective.

 

Le chef de l’Etat clame qu’il n’a pas besoin de tricher puisqu’il peut gouverner sans le Parlement ?

• Il n’a pas besoin de cela ? Je me demande  alors pourquoi il s’obstine à vouloir contrôler absolument le Parlement. Aujourd’hui, les Guinéens sont déçus. Les gens se rendent compte maintenant qu’ils ont fait un mauvais choix. Interrogez les militants et les citoyens guinéens dans la rue, ils sont tous déçus du président qui tient des propos choquants. Vous voyez les brutalités, les violences avec lesquelles il s’attaque à l’unité de la nation. Il tribalise toutes les questions. Il est en train de diviser les Guinéens au lieu de faire en sorte que tous se réconcilient autour des valeurs communes ; au lieu de traiter tous les Guinéens comme des citoyens simplement, il veut considérer les uns comme des Peulh, les autres comme des Sousou.

C’est vrai, la Guinée est fière de sa diversité, mais aujourd’hui, l’Etat doit administrer les citoyens avec les mêmes droits, il doit garantir leur égalité, la sécurité des biens et des personnes. C’est ça son rôle et non chercher à savoir quelle ethnie importe les marchandises ou quelle autre  tient  l’économie. Ce sont tous des citoyens qui ont des droits qu’il faut protéger. Il a complètement tribalisé et divisé les Guinéens. Jamais la Guinée n’a connu autant de divisions que maintenant, depuis qu’il est au pouvoir. Il a une obstination contre l’ethnie peulh et il essaie de procéder à des exclusions de citoyens peulh qui ne sont plus seuls d’ailleurs. Aujourd’hui, tout le monde sent qu’il ne peut pas promouvoir cette réconciliation dont les Guinéens ont besoin.

 

Revenons aux législatives ; au-delà du fait que la société Waymark ait été choisie dans l’opacité, où se trouve le problème ?

• Mais il faut que nous soyons d’accord sur tous ceux qui interviennent dans le processus électoral. Il faut qu’ils soient choisis dans la transparence, parce qu’on a besoin de la confiance de tout le monde.  C’est un montant, semble-t-il, de 16 millions de dollars qui a été débloqué pour la société sud-africaine.  Personne n’a vu le contrat de Weymark. Ceux qui ont mené les audits au nom de la Francophonie et du PNUD ont demandé le contrat,  mais ils  ne l’ont jamais obtenu. Personne ne peut vous produire un document à l’origine de l’implication de Weymark dans le processus électoral.

C’est  le président et son fils qui sont allés en Afrique du Sud choisir cette société pour des raisons qu’eux seuls savent. Il semble que cela est lié aussi à l’emprunt de  5 millions de dollars avec Palladino (un richissime sud-africain). Dans tous les cas, on ne voit pas pourquoi, pour  une question aussi sensible, on ne respectera pas le code du marché public et qu’on ne procédera pas à un appel d’offres. Encore que le gouvernement n’a jamais donné de motif pour dire pourquoi il ne veut pas de la société SAGEM. Les équipements sont là. Toutes les données alpha-numériques et biométriques, les fichiers sont dedans.

La révision aurait été plus simple. Les machines sont performantes. Elles ont été testées partout. Mais pourquoi il n’en veut pas ? Il faut que lui-même crée son propre fichier. Alors que la loi est formelle. Elle dit qu’un fichier permanent doit faire l’objet de révisions périodiques. Ceux qui se sont fait recenser n’ont plus besoin d’aller se faire recenser. Mais il ne veut pas de tout ça parce qu’il tient à tripatouiller le fichier électoral, chose que nous n’accepterons pas.

Vous avez séjourné il n’y a pas très longtemps en Afrique du Sud ;  avez-vous cherché à comprendre les dessous de cette affaire s’il y en a ?

• Pour comprendre peut-être les rumeurs, parce que je ne peux pas accéder à toutes les informations. Le gouvernement avait affirmé ici que ces kits sud- africains étaient un don de l’Afrique du Sud. Ça au moins, au  ministère des Affaires étrangères, la Coopération m’a dit que c’est absolument faux : le gouvernement d’Afrique du Sud n’a pas donné un seul kit à la Guinée. C’est une opération strictement commerciale. Pourquoi choisir cette société qui n’a jamais fait un travail similaire, qui n’a pas de réputation particulière pour qu’on lui confie une mission si délicate en violation flagrante des dispositions du code des marchés publics ?

 

Est-ce que les défaillances de Weymark relevées  par la Francophonie et le PNUD ne peuvent pas être corrigées pour qu’on puisse continuer avec cette société ?

• Attendez ! Nous avions déjà émis des réserves  compte tenu des conditions dans lesquelles cette société a été recrutée. Il n’y a pas de contrat ni d’engagement de la société. Ensuite, on contrôle les machines et on se rend compte qu’elles ne sont pas sécurisées et fiables. Il faut un travail énorme pour les mettre à niveau alors qu’on en a qui sont neuves et performantes  et qui appartiennent à la Guinée. Pourquoi on met de côté ces bonnes machines pour aller  prendre d’autres qui doivent être retravaillées pour les adapter aux besoins de la Guinée, alors qu’il y a des machines déjà conçues pour faire cette révision ? Pourquoi vous ne vous posez pas cette question ?

 

Finalement, l’opposition a deux principales revendications : la bataille pour le fichier électoral et la recomposition de la CENI  avec le départ  de son président.

• Oui ! Pour la question de la CENI, nous voulons que la parité en son sein soit rétablie. Cette ancienne CENI a montré sa mauvaise foi, son incompétence et son incapacité à conduire une élection crédible. Il faut la recomposer pour rétablir la parité, mais on ne peut pas aussi accepter que son ancien président, qui s’est rendu coupable de  fraudes massives contre l’UFDG au premier tour, reste à son poste. C’est lui-même qui s’est rendu dans la circonscription de Ratoma alors qu’il n’avait aucune responsabilité pour prendre les procès-verbaux (P-V), pour ensuite les faire disparaître.

Vous savez  que, dans mes 44%, c’est Ratoma qui est la deuxième circonscription du pays ; et mon fief n’était pas compté parce qu’on n’a pas retrouvé les P-V. C’est Lousséni Camara en personne qui est venu les embarquer dans le coffre de sa voiture. Jusqu’à présent on ne les a pas retrouvés. Vous voulez qu’on laisse ce monsieur diriger encore la CENI ? Il a été condamné à cinq ans de prison pour cela. Il a fait appel et il y a  des arrangements. Nous  voulons donc que la CENI soit paritaire et qu’il y ait une personnalité consensuelle pour la diriger parce qu’on a besoin de la confiance de toutes les parties.

 

L’opposition est-elle écoutée ?

• Je pense que nous sommes écoutés. Depuis que nous avons fait notre grandiose marche du 10 mai, on nous écoute un peu. Mais comme il y a longtemps qu’on ne marche plus, on nous écoute moins. On va reprendre les manifestations pacifiques.

 

Vous avez espoir que vos préoccupations soient prises en compte ?

• Je ne sais  pas, parce qu’Alpha Condé s’obstine à travailler avec Weymark ;  et il a apparemment  un contrat avec le président de la CENI. Donc c’est sûr qu’il va s’accrocher parce que sans les appuis de cette nature, il ne peut pas gagner les élections législatives. Avec les adhésions opportunistes de l’administration, il peut avoir 30%, mais il ne pourra jamais contrôler l’Assemblée d’autant plus que tous ses alliés l’ont quitté. Aujourd’hui, chacun veut aller avec sa propre liste, et il tient, avec le RPG arc-en-ciel, à gagner  la majorité. C’est impossible à moins qu’il n’utilise la fraude et qu’il commande à Lousséni Camara le résultat qu’il veut avoir dans chaque circonscription.

 

Quand on vient en  Guinée, on est frappé par le manque d’eau et d’électricité ; et, apparemment, les gouvernements successifs  n’ont rien pu faire.

• Vous savez, il faut une vision. Il y a des problèmes structurels qui n’ont jamais été traités au niveau de l’électricité. Le pays a un potentiel hydroélectrique énorme. Mais il n’a pas pu maintenir des relations de confiance avec les partenaires. La Guinée a été l’un des premiers pays à être reconnu comme celui susceptible de bénéficier de l’initiative PPTE  qui avait été créée par la Banque mondiale. La mise en œuvre du programme, qui devait conduire au point d’achèvement, n’a jamais pu aboutir, et la gouvernance n’était pas bonne ces dernières années.

Le président Conté était malade. Il était l’otage de certains lobbies  et il était impossible de mettre en œuvre le programme. Lorsque j’étais Premier ministre, je me suis fixé comme objectif cela. J'ai élaboré un programme de stabilisation que les bailleurs de fonds ont approuvé, et on avait conclu qu’on allait avoir le programme et conclure le point d’achèvement en novembre 2006. Malheureusement, les mesures qui devaient être prises pour  y conduire ont touché beaucoup d’intérêts, ceux-ci se sont levés et ils m’ont fait limoger. Donc le programme a été jeté aux calendes grecques.

Je suis allé dans l’opposition parce que c’était impossible de mettre en œuvre un programme cohérent de développement dans le respect des règles de la bonne gouvernance. L’aide est octroyée à des pays qui font preuve de rigueur dans la gestion de la chose publique. La Guinée a donc pris du retard dans la modernisation de ses infrastructures, notamment dans le secteur de l’énergie, en raison de la faiblesse de la gouvernance.

 

Si vous étiez élu, quel serait  votre remède pour guérir la Guinée dans ses secteurs les plus sensibles ?

• Dans le programme de l’UFPG, la priorité, c’est d’instaurer l’Etat de droit, la bonne gouvernance. Il faut avoir de la crédibilité vis-à-vis du peuple de Guinée et vis-à-vis des partenaires au développement. Et, pour cela, il faut faire en sorte qu’il y ait un Etat de droit respectueux des règles de procédure. Qu’il y ait des politiques de développement auxquelles on  fait adhérer les populations pour que leur mise en œuvre donne des fruits et change les conditions de vie. Tous les secteurs ont besoin de réformes ; c’est pourquoi j’avais, comme  premier point de mon programme, le système éducatif. Après l’éducation, c’est les infrastructures, les routes, l’énergie et l’eau. Je pense que changer  la Guinée n’est pas aussi difficile si on a une volonté politique réelle.  Le pays  a un potentiel énorme et j’ai une vision. Je pense que c’est très facile pour moi de le redresser parce que je suis capable de renoncer aux intérêts personnels pour défendre valablement celui de la collectivité nationale.

 

Que vous inspire la situation au Mali ?

• C’est une préoccupation pour tous les Africains, notamment ceux de la sous- région ouest-africaine. Je pense que le Mali était cité comme exemple aussi bien en matière de démocratie que de développement. Ces dernières années, le pays a fait énormément de progrès dans l’amélioration de la gouvernance politique et économique. C’est une grande déception pour nous tous de voir cette nation sombrer dans la violence et la partition qui ne sont pas de nature à favoriser la paix et la stabilité dans la sous-région.

 

Quel jugement portez-vous sur les solutions proposées par la CEDEAO ?

• Je pense qu’on peut faire usage de la force quand c’est nécessaire, mais il faut commencer d’abord par le dialogue. La guerre a toujours des coûts énormes. Il ne faut passer par l’usage de la force qu’au cas où le dialogue et la concertation ne produisent pas une solution rapide.

 

La tension est perceptible sur le plan politique en Guinée. Que faut-il pour que le calme revienne et qu’enfin le pays puisse s’attaquer sérieusement à ses grands maux ?

• Tout dépend du chef de l’Etat ; et je voudrais  justement lui lancer un appel  pour qu’il fasse l’effort nécessaire en vue de  rechercher le consensus et organiser ces élections législatives. Les consultations apaisées supposent qu’il y ait un consensus sur les conditions. Je pense que la possibilité existe. C’est à lui de faire un effort. Il faut qu’il accepte qu’on ait une CENI paritaire, avec un président consensuellement désigné. Il faut qu’il accepte qu’il y ait une gestion transparente du fichier et que se fasse une révision conformément à la loi. Et que celle-ci soit menée par des cabinets choisis dans la transparence.

Que les démembrements de la CENI soient recomposés pour tenir compte de l’existence de l’opposition, puisque la loi nous donne le droit d’en être membre, d’être membre des commissions administratives de recensement. La CENI actuelle a recomposé les démembrements pour expulser les représentants de l’opposition, si bien qu’aujourd’hui toutes les structures sont composées des membres du RPG. Ce n’est pas la meilleure manière de rassurer l’opposition quant à sa volonté d’organiser des élections libres et transparentes.

Je pense que le succès de son mandat dépendra, dans une large mesure, de la qualité des élections qu’il va organiser. La réconciliation des Guinéens dépendra de la qualité des élections, s’il fait organiser un scrutin libre et transparent, que les leaders politiques font librement leur campagne et que chacun est crédité du suffrage que le peuple aura bien voulu lui donner. C’est à ce prix, pensé-je, qu’il y aura la paix, la collaboration pour qu’on puisse sortir notre pays de la marginalisation et de la précarité.

 

Propos recueillis par Adama Ouédraogo Damiss

Source: L'Observateur Paalga

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