Poursuites contre les leaders de l’opposition guinéenne : La raisonnable reculade de Condé

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Depuis le règne du célèbre dictateur Sékou Touré jusqu’à l'ère du professeur Alpha Condé en passant par le pouvoir de Lassana Conté et l’intermède du capitaine Dadis Camara, la Guinée est constamment l'objet de coups d’Etat, de tentatives de déstabilisation, de révoltes et autres remous, si bien que l’histoire de ce pays s'écrit dans le sang.
Pourtant, l’arrivée de l’opposant historique aux affaires en novembre 2010 avait suscité l'espoir de voir ce château d’eau de l’Afrique charrier les ingrédients du développement durable à l’échelle nationale et ainsi irradier toute la sous-région ouest-africaine, tant ses richesses sont énormes ; malheureusement, la situation sociopolitique n’incite guère à l’optimisme.

Dernier soubresaut en date, la marche du 27 février dernier qui avait dégénéré en bataille rangée entre manifestants et forces de l’ordre à Conakry. Bilan : une dizaine de morts et d'importants dégâts matériels. En réaction, la justice guinéenne a annoncé des poursuites contre les leaders de l’opposition pour attroupement, entraves à l’exercice des droits et de libertés individuelles, outrage à des dépositaires de la force publique, coups et blessures volontaires, pour ne citer que ces délits. Sont dans le collimateur du pouvoir Cellou Dalein Diallo, Sidya Touré Lassana Kouyaté, Moctar Diallo Baidy Aribot, bref tout ce que le pays compte de figures politiques respectables qui ne voient pas les choses comme Alpha Condé. Naturellement, un tel maillage judiciaire ne pouvait, vous vous en doutez, que contribuer à exacerber les tensions politiques, qui plombent déjà le pays. Comme il fallait s’y attendre, les opposants ont menacé de répondre à la convocation de la justice, accompagnés de leurs militants. Une initiative pleine de dangers. En effet les militants, on le sait, n’ont pas l’intention d’aller ovationner les juges. Bien au contraire, ils dénonceront le principe même de la convocation. Face à cette mise en garde des leaders du collectif, le gouvernement à dû reculer une première fois en restreignant le couperet judiciaire aux seuls signataires de la lettre d’information relative à la manifestation, ce qui n’a pas fait bouger les lignes du côté des adversaires du régime, déterminés à donner la réplique dans la rue. En principe, c’était hier que les accusés devaient se présenter devant les magistrats mais le pouvoir, dans un communiqué rendu public la veille, a demandé aux autorités judiciaires de suspendre la procédure. Ce ne sont certainement pas les arguments juridiques qui manqueront parce que comme on le dit, c'est le parquet qui décide de l'opportunité des poursuites. Une nouvelle reculade qui laisse penser que le gouvernement a pris la pleine mesure des risques qu’encourt le pays s’il s’obstine à régler les différends politiques avec la complicité des hommes en toge. Une chose est sûre, et nous l’écrivions déjà dans notre livraison du jeudi : «il faut plutôt un consensus politique pour sortir ces pays (Ndlr le Togo et la Guinée) de la spirale des crises politiques et sociales dans laquelle ils semblent englués depuis des décennies». Alors, rachète le temps, professeur !
Abdou Karim Sawadogo

Source: L'Observateur Paalga

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